Un an près avoir racheté l'"Evening Standard", l'oligarque russe Alexandre Lebedev s'offre le quotidien "The Independent", en difficulté financière. Il n'a déboursé qu'une livre symbolique pour s'offrir ce grand titre de la presse britannique.
AFP - L'homme d'affaires russse Alexandre Lebedev, ancien espion au KGB, a fait fortune dans la finance à la chute de l'URSS. Devenu riche, il se pose à présent en philanthrope et en sauveur de journaux, comme le quotidien britannique Independent, dont il vient de boucler le rachat.
La biographie officielle de cet homme de 50 ans ne dit rien sur la manière dont il a acquis son premier actif, la National Reserve Bank, tout juste après avoir quitté le KGB en 1992, une année noire pour la Russie mais qui pour les plus roublards ou les mieux informés fut synonyme de milliards de dollars.
L'empire de Lebedev, une holding dénommée National Reserve Corporation détient des participations substantielles dans plusieurs grandes entreprises russes de divers secteurs, finance ou énergie.
Mais M. Lebedev insiste sur le fait que la presse lui tient particulièrement à coeur.
"La presse écrite (...) est un élément extrêmement important pour une société démocratique. Je traite les médias comme quelque chose pour lequel il faut vraiment se sacrifier", a-t-il dit à l'AFP jeudi, peu avant l'annonce de son rachat du quotidien en difficulté Independent pour une livre symbolique (1,12 euro).
"Je ne considère pas les journaux comme un commerce", a ajouté M. Lebedev, dont l'empire médiatique inclut également le quotidien britannique Evening Standard, qu'il a racheté l'an dernier, ainsi qu'une participation dans la publication russe d'opposition Novaïa Gazeta.
"Je les traite comme allant de ma responsabilité", a-t-il observé.
Lui et son ami proche, l'ex-numéro un soviétique Mikhaïl Gorbatchev, détiennent conjointement 49% du journal d'opposition russe Novaïa Gazeta, dont la journaliste vedette, Anna Politkovskaïa, a été assassinée en octobre 2006.
Ensemble, ils ont aussi monté un fond de lutte contre le cancer chez les enfants, la Raïsa Gorbatchev Foundation, du nom de la femme du dernier dirigeant de l'URSS.
En Russie, Alexandre Lebedev n'a fait qu'un bref passage en politique, perdant une élection municipale contre le tout puissant et sulfureux maire de Moscou, Iouri Loujkov, avant de siéger de 2003 à 2008 à la Douma, la chambre basse du Parlement russe.
Là, il a cherché à faire passer des mesures pour défendre la liberté de la presse ou réformer le système judiciaire et la police, alors que le président d'alors, Vladimir Poutine, entraînait doucement la Russie vers l'autoritarisme.
Jamais Lebedev ne va cependant jusqu'au choc frontal avec les dirigeants russes, restant à la marge de l'opposition et s'en tenant aux règles fixées par le Kremlin: un homme d'affaires n'a rien à craindre du régime tant qu'il ne songe pas à une véritable carrière en politique.