
Le président américain Donald Trump s'adresse aux journalistes à la Maison Blanche, à Washington, le 15 juin 2025. © Mandel Ngan, AFP
Entre la réforme annoncée des visas de journalistes et les menaces plus ou moins voilées à leur endroit de certains proches de Donald Trump, la presse étrangère est sous pression aux États-Unis.
"D'où êtes-vous ?", a demandé mardi le président américain à un journaliste l'interrogeant sur son implication dans les affaires financières de sa famille. Apprenant que le reporter était australien, Donald Trump l'a rabroué vivement : "Vous faites beaucoup de mal à l'Australie (...). Votre dirigeant va venir me voir très bientôt. Je lui parlerai de vous. Je n'aime pas du tout votre ton."
L'échange a été très commenté, même si en général, "quand Trump s'en prend à un journaliste, qu'il soit étranger ou américain n'a pas d'importance", assure le correspondant d'un média étranger à Washington, qui demande l'anonymat.
"Ce serait un cauchemar"
Plus que les attaques présidentielles, ce qui l'inquiète, c'est son projet de faire passer à 240 jours – contre cinq ans jusqu'à maintenant – la durée initiale des visas accordés aux représentants de médias étrangers, avec une durée plus courte de 90 jours pour les journalistes chinois.
Une centaine de médias et organisations de presse internationaux, dont France Médias Monde, ont estimé dans une lettre ouverte que cela "amoindrirait la quantité et la qualité de la couverture" de l'actualité américaine.
"Ce serait un cauchemar", lance le journaliste déjà cité. "Comment louer un logement, obtenir un permis de conduire, mettre son enfant à l'école avec un visa de 240 jours ?", s'interroge-t-il, soulignant aussi qu'il faut "du temps pour se constituer un réseau de sources" et comprendre les États-Unis.
Un autre journaliste, correspondant d'un média européen, note lui que "la précarisation des journalistes étrangers ne fait pas d'eux des cibles privilégiées de cette administration" mais "s'inscrit dans un tableau d'ensemble très inquiétant". "La Maison Blanche n'aime les journalistes qu'acquis à ses sujets ou bien s'autocensurant assez pour normaliser ce qui se passe", d'où qu'ils soient, avance-t-il.
"Pas de place aux États-Unis pour ce genre d'agitateur"
"La liberté de la presse ne s'arrête pas aux frontières. Elle dépend de correspondants qui peuvent travailler ici sans craindre que leur temps ne soit compté", a protesté de son côté sur X le président du National Press Club, Mike Balsamo. Cette association de journalistes basée à Washington signale que ces restrictions pourraient susciter des représailles à l'encontre des journalistes américains travaillant à l'étranger.
Si les correspondants interrogés ne notent pas d'hostilité particulière de la Maison Blanche elle-même, ils soulignent que des figures politiques du mouvement Maga (Make American Great Again) n'hésitent pas à viser spécifiquement des journalistes étrangers.
Richard Grenell, un proche de Donald Trump qui a été ambassadeur en Allemagne, a récemment appelé sur X à supprimer le visa d'un journaliste de la chaîne publique de télévision allemande ZDF. "Il n'y a pas de place aux États-Unis pour ce genre d'agitateur", a-t-il écrit, critiquant une intervention vidéo de ce reporter consacrée à l'un des plus influents conseillers de la Maison Blanche, Stephen Miller.
Avec AFP