Après plusieurs semaines de manifestations au Bangladesh ayant mené à la prise de contrôle du pays par l'armée et à la fuite à l'étranger de Sheikh Hasina, les troubles se poursuivent. Une foule tentait jeudi 15 août d'empêcher les partisans de la Première ministre déchue de se rassembler devant la maison de son enfance.
Sheikh Hasina, 76 ans, s'est enfuie en hélicoptère vers l'Inde le 5 août alors que les rues de Dacca étaient envahies par les manifestants réclamant son départ après quinze ans de pouvoir sans partage.
Le 15 août est l'anniversaire de l'assassinat en 1975 de son père, le héros de l'indépendance Sheikh Mujibur Rahman, lors d'un coup d'État militaire. Sous le gouvernement de Sheikh Hasina, cette date avait été déclarée fête nationale et donnait lieu à des rassemblements de masse en faveur du pouvoir.
Ce jour-là, les fonctionnaires étaient sommés de se recueillir devant la résidence familiale où a eu lieu l'assassinat. Une obligation que le nouveau gouvernement provisoire, mis en place après la chute du régime, a abandonnée.
La résidence était jusqu'à récemment un musée consacré à Sheikh Mujibur Rahman, mais elle a été incendiée et vandalisée par les manifestants quelques heures après la fuite de Sheikh Hasina.
Mardi, dans sa première déclaration publique depuis son exil, elle avait demandé à ses partisans de venir sur place pour "prier pour le salut de toutes les âmes en offrant des guirlandes de fleurs". Mais les étudiants à l'origine du mouvement de contestation étaient bien décidés à les en empêcher.
"La fugitive et dictatrice Sheikh Hasina a ordonné à ses larbins et à ses milices de se rendre sur place afin de faire une contre-révolution", a déclaré à l'AFP Imraul Hasan Kayes, 26 ans. "Nous sommes ici en gardiens de notre révolution afin qu'elle ne nous échappe pas", a-t-il affirmé.
Roués de coups
Sans police en vue, des centaines d'hommes, étudiants ou non, ont formé une barricade humaine dans la rue menant à la maison. Plusieurs personnes soupçonnées d'être des partisans de la Ligue Awami, le parti de l'ancienne Première ministre, ont été rouées de coups de bâton, et d'autres ont été emmenées de force, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Plus tôt cette semaine, un tribunal de Dacca a ouvert une enquête pour meurtre contre Sheikh Hasina, deux hauts responsables de la Ligue Awami et quatre officiers de police, en lien avec la répression des manifestations antigouvernementales. Les troubles ont fait plus de 450 morts, dont 42 policiers, selon un décompte de l'AFP effectué d'après des sources hospitalières et policières.
Plusieurs autres dignitaires de la Ligue Awami ont été arrêtés dans le cadre d'autres enquêtes, dont l'ancien ministre de la justice Anisul Huq et le conseiller économique Salman Rahman.
Les deux hommes ont comparu devant un tribunal mercredi, menottés et portant des casques pour leur protection, sous haute surveillance policière.
Le prix Nobel de la paix Muhammad Yunus est rentré d'Europe le 8 août pour prendre la tête d'un gouvernement de transition, qui doit relever le défi monumental de conduire des réformes démocratiques.
Le gouvernement de Sheikh Hasina a été accusé de violations systématiques des droits humains, notamment les arrestations massives ou exécutions extrajudiciaires de milliers d'opposants politiques.
Muhammad Yunus a déclaré jeudi qu'il s'était entretenu avec le responsable des droits de l'Homme des Nations unies, Volker Turk, "afin d'ouvrir une enquête".
Avec AFP