Le procureur de Paris décide de faire appel de la relaxe de Dominique de Villepin prononcée hier par le tribunal correctionnel de Paris dans l'affaire Clearstream. L'ancien Premier ministre accuse le président Sarkozy d'être derrière cette décision.
Coup dur pour Dominique de Villepin. Alors qu’il pensait pouvoir définitivement tourner la page du dossier Clearstream, le procureur de Paris a annoncé vendredi qu'il allait faire appel de la relaxe de l'ancien Premier ministre, prononcée la veille par le tribunal correctionnel de Paris.
Pour l’intéressé, il s'agit d'une décision "politique", qui est l’œuvre du président de la République. "Nicolas Sarkozy préfère persévérer dans son acharnement, dans sa haine", a ainsi déclaré Dominique de Villepin sur la radio RMC Info, estimant que le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, n’avait pas pris cette décision de son propre chef.
itQuelques minutes auparavant, ce dernier a déclaré, quant à lui, sur les ondes d'Europe 1 que "le tribunal [correctionnel de Paris] n'a pas tiré toutes les conclusions de ce qu'il a entendu. Tout n'a pas été dit dans cette affaire. Il y a encore la place pour faire émerger une part de vérité". Pour cette raison, a-t-il encore ajouté, "j'ai décidé d'interjeter appel de cette décision". Prenant les devant sur d’éventuelles critiques, le magistrat, qui avait requis 18 mois de prison avec sursis et 45 000 euros d'amende à l'encontre de Dominique de Villepin pour "complicité de dénonciation calomnieuse", a ajouté avoir pris cette décision seul.
"Détournement de la fonction présidentielle"
Le parquet, qui a dix jours pour faire appel, n’aura pas attendu 24 heures pour prendre une telle décision. Pour Michael Szames, journaliste à FRANCE 24, cette annonce est "rapide", ce qui, selon lui, incite à se demander qui des "deux patrons de Jean-Claude Marin, la garde des Sceaux et le président de la République", en a pris l'initiative.
Pour sa part, Dominique de Villepin, qui ne cache guère ses ambitions pour la présidentielle de 2012, n’en démord pas. Il évoque "un détournement de la fonction présidentielle, un détournement du pouvoir". "Je regrette que ce spectacle pitoyable soit donné aux Français, je regrette que la justice soit instrumentalisée", a-t-il poursuivi sur RMC Info.
Le communiqué diffusé hier par l'Élysée, dans lequel Nicolas Sarkozy annonçait qu'il était satisfait du jugement et ne ferait pas appel de la décision, laissait pourtant penser que le dossier était clos.
itUne stratégie à double tranchant
Avec cet appel, l’ex-Premier ministre risque à nouveau de perdre son éligibilité si la justice décide finalement de revenir sur sa décision et de le condamner.
Reste qu'un nouveau procès pourrait ne pas être complètement préjudiciable à Dominique de Villepin. "Il va encore être dans la lumière et on ne parlera que de lui, estime Michael Szames. Il en fera une tribune", affirme celui-ci, avant de se demander si "ce n’est pas une erreur de la part de Nicolas Sarkozy de mettre ainsi son rival sur le devant de la scène". La question se pose d'autant plus que le chef de l'État sera absent du procès en appel - L'Élysée a confirmé, vendredi, au quotidien Le Monde que Nicolas Sarkozy ne se constituerait pas partie civile.
Nicolas Sarkozy envisage peut-être "une autre stratégie", tempère toutefois le journaliste : montrer, à l'occasion d’un second procès qui pourrait avoir lieu avant la présidentielle de 2012, que Dominique de Villepin est effectivement bien à l’origine de cette affaire.
Une hypothétique stratégie que rejette fermement Dominique Paillé, porte-parole de l’UMP. Interrogé par FRANCE 24, celui-ci martèle qu’il n’y aura pas de compétiton en 2012 : "Si Dominique de Villepin veut être candidat à la présidentielle comme il le laisse transpirer, il peut l’être. S’il souhaite que ce soit en tant que candidat de l’UMP, il faudra qu’il se soumette au suffrage des militants. Sinon, il le sera en dissidence."
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