À seulement 22 ans, il est déjà la figure de proue médiatique de l'équipe de France d'athlétisme, surtout en l'absence du vétéran Kevin Mayer. Sasha Zhoya a son destin en main mercredi 7 août au moment de disputer les demi-finales du 110 m haies. Pour le fantasque prodige, il est l'heure de confirmer les espoirs placés en lui.
Il avait fallu une cour assidue de la fédération française d'athlétisme (FFA) pour convaincre Sasha Zhoya d'évoluer en bleu. Né en Australie d'une mère française et d'un père zimbabwéen, il avait l'embarras du choix. Surtout avec ses références sportives chez les jeunes.
Ses performances en cadet ont en effet saliver tous les suiveurs de l'athlétisme : il a établi les meilleures performances mondiales de la catégorie du 110 m haies (12"87, temps toujours inégalé) et du saut à la perche, qui le situe tout simplement dans les mêmes références qu'Armand Duplantis au même âge
À l'Insep, cœur de la formation sportive française, Sasha Zhoya s'est spécialisé sur les haies, avec des titres et des records chez les jeunes, trois titres consécutifs de champion de France du 110 m haies malgré une concurrence féroce (2022-2024) et un coup d'éclat avec sa 6e place mondiale l'été dernier à Budapest, assortie d'un record (13.15).
"Je ne dois pas me prendre la tête"
Mais le prodige couvé par le champion du monde 2005 Ladji Doucouré a aussi multiplié les blessures sans jamais pouvoir exprimer son talent sur une saison complète. En 2024, après des courses aux antipodes en février et en mars, il n'a repris que fin juin, après avoir souffert d'un tendon d'Achille, s'imposant notamment de façon probante au meeting de ligue de diamant de Paris le 7 juillet.
"Je n'ai encore pas eu d'été avant que les grandes courses ne commencent. Je vais aux Jeux olympiques pour une belle course. C'est un jeu mental, ma technique est installée depuis un moment, je ne dois pas me prendre la tête avec le niveau de la concurrence et faire ma propre course", a-t-il expliqué.
Le niveau s'annonce en effet très élevé pour décrocher une médaille, alors que Zhoya n'a que le 8e meilleur temps des engagés, et que les trois Américains, dont le triple champion du monde Grant Holloway, ont couru en moins de 13 secondes, la marque des grands champions de la discipline.
"Aux JO, ce ne sont pas les plus beaux chronos qui tombent, celui qui gagne c'est l'athlète qui est là mentalement", rétorque le spécialiste de cette épreuve à risque, où une haie peut faire chuter n'importe qui.
Habile et suivi sur les réseaux sociaux, où il maîtrise les codes de sa génération, Zhoya a parfois souffert du train-train de l'Insep, où l'ancien danseur hyperactif et DJ en herbe s'ennuie souvent. Il s'aère l'esprit en partant rendre visite à sa petite amie danoise ou lors de stages, en Floride, par exemple, chez le meilleur hurdler du monde, l'Américain Grant Holloway.
Homme de son temps, égérie Dior, Sasha Zhoya est aussi à l'aise dans le milieu de la mode et face aux objectifs des photographes. En juillet, il avait réclamé le droit de porter une jupe lors de la cérémonie d'ouverture : "Si les femmes ont le droit de mettre le pantalon, ça pourrait être bien aussi si les hommes peuvent avoir le choix de mettre les jupes", avait-il lancé. "2024, on peut mettre tout. Il n'y a pas d'homme/femme dans la mode, maintenant. Regardez, on change un peu !"
Droit accordé par le CNOSF même si le hurdler n'est finalement pas apparu en jupe sur la Seine. Un problème de cintrage a-t-il évoqué et pas l'envie que ce soit l'unique chose dont on parle à propos de la cérémonie : "[Porter une jupe pour un homme] ne devrait même pas faire le buzz", a-t-il repoussé
Comme Noah Lyles, le jeune homme aime faire le show et devrait profiter à fond du bruyant soutien du public du Stade de France.
"J'ai regardé beaucoup de sports olympiques, je me suis mis dans l'ambiance des Jeux. Je suis allé à la natation, j'ai été surpris par l'ambiance de dingue pour les Français ! J'ai hâte de voir ça dans un stade de 70 000 personnes", salive-t-il.
Avec AFP