"Sordide", "abject" : les réactions s'accumulent mercredi 19 juin, en pleine campagne électorale, après la mise en examen la veille de deux adolescents de 13 ans pour viol en réunion, menaces de mort, injures et violences à caractère antisémite sur une jeune fille de 12 ans à Courbevoie, en région parisienne.
Les deux adolescents de 13 ans ont été placés sous mandat de dépôt. Un troisième suspect, âgé de 12 ans, a été placé sous le statut de témoin assisté pour viol et mis en examen pour les autres infractions visées par l'enquête et fait l'objet d'une mesure éducative provisoire, selon le parquet de Nanterre.
En pleine campagne électorale, cette affaire suscite de nombreuses réactions de part et d'autre de l'échiquier politique.
Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé sur X le "racisme antisémite". "Horrifié par ce viol à Courbevoie et tout ce qu'il met en lumière concernant le conditionnement des comportements masculins criminels dès le jeune âge, et du racisme antisémite", a déclaré Jean-Luc Mélenchon, régulièrement accusé par des opposants politiques de propos ambigus sur l'antisémitisme.
Horrifié par ce viol à Courbevoie et tout ce qu'il met en lumière concernant le conditionnement des comportements masculins criminels dès le jeune âge, et du racisme antisémite. Solidarite et pensées émues pour la victime et ses proches. J'espère que les soins secours et…
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) June 19, 2024Dans la foulée, le députée sortant de la Somme François Ruffin a dénoncé sur X un "horrible viol antisémite", qui "doit nous percuter au plus profond, sur ce qu'il révèle".
"L'antisémitisme, les violences faites aux femmes, sont des plaies béantes de notre société. Nous devons regarder cette réalité en face et agir résolument", a également réagi la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier, quand son homologue du PCF Fabien Roussel a dénoncé "un crime atroce qui nous rappelle une fois de plus que l'antisémitisme gangrène notre société et grandit dangereusement".
Mardi, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, avait fustigé le "fléau" de la "haine antisémite", appelant à la combattre "sans faiblesse et sans répit".
De son côté, le président Emmanuel Macron a demandé, mercredi au cours du Conseil des ministres, qu'"un temps d'échanges" soit organisé dans les prochains jours dans les écoles sur le racisme et l'antisémitisme.
Le chef de l'État a eu des "paroles solennelles et graves sur le fléau de l'antisémitisme" au cours du Conseil des ministres, a indiqué son entourage. En souhaitant ces discussions, il veut faire en sorte que "les discours de haine porteurs de lourdes conséquences" ne s'"infiltrent pas" dans les établissements scolaires, a-t-on ajouté.
À l'extrême droite, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a appelé à "combattre cet antisémitisme qui s'abat sur la France depuis le 7 octobre" et les attaques sanglantes menées par le Hamas en Israël.
Marine Le Pen s'en est elle prise frontalement à "l'extrême gauche" et à sa supposée "stigmatisation des juifs depuis des mois à travers l'instrumentalisation du conflit israélo-palestinien".
"Affaire sordide"
Les faits ont été dénoncés par la jeune fille samedi soir. Selon une source policière, la mineure a expliqué avoir été abordée par trois adolescents et entraînée dans un hangar alors qu'elle se trouvait dans un parc proche de son domicile avec un ami.
Les suspects l'ont frappée et "lui ont imposé des pénétrations anales et vaginales, une fellation, tout en lui proférant des menaces de mort et des propos antisémites", a précisé cette même source. Son ami est parvenu à identifier deux des agresseurs.
L'association SOS Racisme a apporté "tout son soutien à la victime et à sa famille" dans cette "affaire sordide", rappelant l'augmentation "inquiétante" des actes antisémites depuis le 7 octobre.
Mercredi matin, le collectif Nous vivrons, né au lendemain de l'attaque sanglante du Hamas, a appelé à manifester ce même jour à 18 h 30 à Paris pour "condamner le viol antisémite de cette jeune fille".
Dans la communauté juive, les faits dénoncés par la jeune fille ont provoqué une vive émotion. Le président du Consistoire central, Elie Korchia, a exprimé mardi soir dans un tweet son "soutien à cette jeune victime, de confession juive, qui a subi un viol et des agressions insupportables", déplorant "un crime sexuel sordide et ignoble qui nous émeut profondément".
"Nul ne saurait être dédouané face à ce déferlement antisémite sans précédent", a commenté sur X le grand rabbin de France Haïm, Korsia, se disant "horrifié".
Sur le même réseau social, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a dit son "immense émotion face au viol tragique de cette jeune fille", prévenant qu'il suivra "avec vigilance tous les développements de cette affaire extrêmement inquiétante".
"Le viol est un outil de destruction au service de la haine et lorsque des enfants violent des enfants, c'est aussi la société toute entière qui doit se poser la question de sa responsabilité face à la violence, l'antisémitisme et la misogynie à l'œuvre dans notre pays", a réagi la Fondation des femmes.
Le viol est un outil de destruction au service de la haine et lorsque des enfants violent des enfants, c’est la société toute entière qui doit se poser la question de sa responsabilité face à la violence, l’antisémitisme et la misogynie à l’oeuvre dans notre pays.
— Fondation des Femmes (@Fondationfemmes) June 19, 2024"C'est un acte abject, on ne peut pas penser que ça existe encore", a déclaré à l'AFP Jacques Kossowski, maire Les Républicains de Courbevoie. "Ce que j'espère, c'est que la justice puisse condamner fermement ces agresseurs, quel que soit leur âge", a poursuivi l'édile.
Les actes antisémites ont flambé en France au premier trimestre 2024, selon des chiffres du gouvernement, qui a fait état de "366 faits antisémites" recensés entre janvier et mars, en hausse de 300 % par rapport aux trois premiers mois de l'année 2023.
En janvier, le Crif avait rapporté une forte augmentation des actes antisémites en France, qui ont été multipliés par quatre en un an, passant de 436 en 2022 à 1 676 en 2023, avec une "explosion" après le 7 octobre.