Des mains rouges ont été taguées sur le "Mur des Justes" à l'extérieur du Mémorial de la Shoah et sur plusieurs bâtiments du quartier historique juif à Paris, incitant les autorités municipales à saisir la justice mardi 14 mai.
"Dans la nuit du 13 au 14 mai, des individus cagoulés ont dégradé le 'Mur des Justes' ainsi que d'autres lieux du quartier", a affirmé dans un communiqué le Mémorial de la Shoah qui précise avoir déposé plainte.
"Des mains rouge-sang ont été peintes" sur ce mur où sont apposées des plaques listant les 3 900 hommes et femmes qui ont contribué à sauver des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, a détaillé de son côté le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Yonathan Arfi dans un message sur X, dénonçant un acte "abject".
"Dégrader le Mur des Justes parmi les Nations, barrage des Lumières contre le nazisme, c'est porter atteinte à la mémoire de ces héros comme à celle des victimes de la Shoah", a déclaré le président Emmanuel Macron sur X. "La République, comme toujours, demeurera inflexible face à l'odieux antisémitisme", a-t-ajouté.
Dégrader le Mur des Justes parmi les Nations, barrage des Lumières contre le nazisme, c'est porter atteinte à la mémoire de ces héros comme à celle des victimes de la Shoah.
La République, comme toujours, demeurera inflexible face à l'odieux antisémitisme.
Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées dans la soirée à l'extérieur du Mémorial de la Shoah pour dénoncer un acte de "profanation".
"Toucher à la mémoire des Justes, c'est toucher à la mémoire de la République", a lancé Sarah Aizenman, la présidente du collectif "Nous vivrons" à l'initiative du rassemblement.
Plusieurs centaines de personnes avaient répondu à l'appel, parmi lesquelles des élus parisiens, le président du Crif Yonathan Arfi et la rabbin et écrivaine Delphine Horvilleur.
"Cet acte est la lâcheté même. Ce n'est pas une dégradation, c'est une profanation", a estimé Patrick Klugman, président du Comité français pour Yad Vashem.
Pour Valérie Segal, 62 ans, petite fille de déportés juifs, "ces mains rouges, c'est comme si on tuait mes grands-parents une deuxième fois".
D'autres lieux tagués
Les tags ont été découverts un peu avant 4 h 00 par des agents de sécurité du mémorial. Peints sur ce "Mur des Justes" qui se situe dans l'allée jouxtant le Mémorial, ils ont été effacés en fin de matinée.
Une dizaine d'autres lieux ont également été tagués dans le quartier du Marais, du "type écoles ou crèches", a indiqué à l'AFP Ariel Weil, le maire PS de Paris Centre, secteur qui regroupe les quatre premiers arrondissements de la capitale.
La maire socialiste de Paris Anne Hidalgo, qui a condamné des "actes inqualifiables", a indiqué avoir procédé au signalement à la procureure de Paris de ces actes "potentiellement constitutifs du délit d'injure publique à caractère antisémite".
"Nous allons porter plainte systématiquement dans tous les endroits où ces symboles seront posés", a ajouté Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la marie de Paris, venu dire son "effroi" face à cette "profanation" qui lui a rappelé celle du cimetière de Carpentras en 1990.
Le symbole des "mains rouges" avait été au cœur d'une polémique fin avril lorsque des étudiants de Sciences-Po Paris avaient exhibé leurs paumes peintes en rouge devant l'école, comme un appel au cessez-le-feu dans la bande de Gaza selon eux. Mais plusieurs voix s'étaient élevées pour dénoncer une allusion au lynchage de deux soldats israéliens à Ramallah en 2000 par des Palestiniens.
"Vandalisme antisémite"
"À tous ceux qui disaient que les mains rouges n'étaient pas un symbole antisémite (...), les voilà apposées sur le Mur des Justes", a écrit sur X la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot. La ministre chargée de la lutte contre les discriminations Aurore Bergé a dénoncé une "indignité absolue".
Cet acte intervient sur fond de flambée des actes antisémites (+300 % à 366, selon le Premier ministre Gabriel Attal).
Il a soulevé une vive émotion au sein de la communauté juive, d'autant plus forte que les tags ont été découverts le jour anniversaire de la "Rafle du billet vert" qui avait constitué la première arrestation massive de juifs le 14 mai 1941 à Paris.
Le Grand rabbin de France Haïm Korsia a dénoncé un "odieux outrage à la mémoire de millions de personnes mortes pendant la Shoah" et le Congrès juif mondial a condamné sur X un "vandalisme antisémite".
En octobre, la découverte d'étoiles de David taguées sur des immeubles en région parisienne avait fait craindre une contagion du conflit israélo-palestinien. Mais l'affaire, pour laquelle un couple de Moldaves a été interpellé, a au final été imputée par les autorités françaises à une opération pilotée par les services de sécurité russes (FSB).
Avec AFP