
Des préparatifs ont été menés lundi dans un bidonville de la commune de Koungou à Mayotte, à la veille d'une première opération d'expulsion. Les autorités entendent procéder, dans le 101e département français, à des expulsions d'étrangers en situation irrégulière, pour la plupart originaires des Comores, dans le cadre d'une vaste opération baptisée "Wuambushu" ("reprise" en mahorais).
Des préparatifs ont été menés lundi 24 avril dans un bidonville de la commune de Koungou à Mayotte, à la veille de la première opération d'expulsion prévue mardi à 6 h, heure locale (3 h GMT), a constaté une journaliste de l'AFP.
"C'est le dernier jour de préparation avant la démolition de demain", a indiqué Psylvia Dewas, chargée de projet sur l'habitat insalubre à la préfecture de Mayotte, coordinatrice des opérations de décasage.
Au total, 85 familles de cette opération, initiée depuis un an, sont sous le coup d'une expulsion.
Des marquages ont été apposés à l'aube sur 20 habitations qui seront épargnées car elles sont sous le coup d'une procédure de référé, a précisé Psylvia Dewas.
Le quartier de "Talus 2" est un enchevêtrement de tôles bleues et grises, accroché à une colline, où plus d'une centaine de familles d'origine comorienne vivent, certaines depuis 35 ans, dans des conditions précaires.
"Sur l'île de Mayotte, on estime à 30 % l'habitat en tôle, illégal, construit sans autorisation, ni titre et insalubre et à ce titre dangereux, surtout dans la mangrove ou des pentes, et susceptible de partir au moment de la saison de pluie", a expliqué la coordinatrice, chiffrant à 100 000 personnes la population des bidonvilles sur l'île.
Dans une école proche, les personnes étaient invitées par les associations à venir organiser leurs hébergements d'urgence, mis à disposition pour une durée de 21 jours.
"Je dormirai dehors, quelque part sur une terrasse si quelqu'un veut bien, si personne ne veut et bien je ne sais pas, je prendrai ma natte pour m'installer sur la route et dormir", a dit à l'AFP l'une des habitantes, Mariam Ali M'Hadji, 53 ans, en attente d'être prise en charge par les associations.
1 800 policiers et gendarmes mobilisés
La France prévoit de déloger des migrants en situation irrégulière des bidonvilles de Mayotte, 101e département français, et d'expulser les sans-papiers, dont la plupart sont des Comoriens, vers Anjouan, l'île comorienne la plus proche située à 70 km.
Les deux députés de Mayotte, Estelle Youssouffa (Liot) et Mansour Kamardine (LR), ont apporté lundi leur "soutien" à cette opération. "On soutient cette opération, qu'on a appelée de nos vœux. C'est à notre demande, nous Mahorais, que le gouvernement a lancé cette opération. Les bidonvilles sont des foyers d'insécurité, de violence, qui abritent les trafiquants et les gangs qui sèment la terreur", a notamment défendu Estelle Youssouffa, invitée de la matinale de Radio Classique.
Dimanche, l'association Droit au logement (DAL) avait appelé les autorités à stopper cette opération, qu'elle qualifie de "brutale" et d'"anti-pauvres".
Par ailleurs, le collectif "Uni-e-s contre une immigration jetable" (UCIJ-2023), qui réunit 400 associations et syndicats, a lancé une mobilisation nationale contre cette opération.
"Il y a une vraie obscénité à entendre ça. Au fond, que disent ces associations ? Qu'il faut maintenir les bidonvilles ? Qu'il faut maintenir des gens sur un territoire alors qu'ils n'ont pas le titre de séjour nécessaire ?", a répondu lundi Estelle Youssoufa.
Le gouvernement n'a pas donné de date précise de lancement ni de fin pour cette opération "Wuambushu" ("reprise" en mahorais). Quelque 1 800 policiers et gendarmes, dont des centaines de renforts de métropole, sont mobilisés dans le petit archipel de l'océan Indien.
Selon l'Insee, près de la moitié de la population de Mayotte ne possède pas la nationalité française, mais un tiers des étrangers sont nés sur l'île. En 2022, les autorités ont procédé à 25 380 reconduites à la frontière, selon la préfecture de Mayotte.
Avec AFP