
Pyongyang a lancé mercredi au moins 23 missiles, dont l'un est tombé près des eaux territoriales sud-coréennes, provoquant une hausse des tensions avec la Corée du Sud voisine. Séoul a riposté en lançant trois missiles vers la mer.
Les deux Corées ont procédé mercredi 2 novembre à des échanges de tirs de missiles. La Corée du Nord a tiré six "missiles sol-air supplémentaires", a annoncé l'armée sud-coréenne, qui avait déjà détecté auparavant le lancement d'au moins 17 projectiles dans la matinée. Séoul a répliqué en lançant trois missiles.
Le président sud-coréen Yoon Suk-yeol a fustigé la "provocation" de Pyongyang, dénonçant une "invasion territoriale de fait".
La Russie a appelé "tout le monde à garder son calme". "Toutes les parties de ce conflit doivent éviter de prendre des mesures susceptibles de provoquer une montée des tensions", a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
De son côté, le président du Conseil européen Charles Michel s'est "outré" par ces tirs nord-coréens. "Au nom de l'Union européenne, j'exprime notre solidarité avec la Corée (du Sud) et les autres pays de la région", a-t-il réagi sur Twitter.
Alerte au raid aérien
L'armée nord-coréenne a également procédé à plus d'une centaine de tirs d'artillerie dans la "zone tampon" maritime entre les deux pays, au moment où la Corée du Sud et les États-Unis effectuent dans la région d'importantes manœuvres aériennes dénoncées par Pyongyang.
Trois missiles balistiques nord-coréens de courte portée ont été lancés à 8 h 51 (23 h 51 GMT mardi), et l'un a franchi la "Ligne de limite du Nord", qui constitue de fait la frontière maritime entre les deux pays.
Ce tir a provoqué une rare alerte au raid aérien dans l'île sud-coréenne d'Ulleungdo, située à environ 120 km à l'est de la péninsule coréenne, où les habitants ont reçu consigne de se réfugier dans des bunkers.
Selon l'armée de Séoul, c'est "la première fois depuis la division de la péninsule" après la guerre de Corée en 1953 qu'un missile nord-coréen est tombé si près des eaux territoriales du Sud.
Yoon Suk-yeol a "souligné que la provocation nord-coréenne est une invasion territoriale de fait par un missile qui a franchi la Ligne de limite du Nord pour la première fois depuis la division" de la péninsule, a déclaré la présidence sud-coréenne dans un communiqué.
"Très rare et intolérable"
Avant et après ce tir, la Corée du Nord a lancé au cours de la journée de mercredi un total de 22 autres projectiles, dont des missiles balistiques à courte portée et des missiles sol-air, selon l'armée sud-coréenne. Et en début d'après-midi, toujours selon Séoul, l'armée nord-coréenne a procédé à une centaine de tirs d'artillerie depuis la province de Kangwon, dans le sud-est du pays, vers l'intérieur de la "zone tampon" frontalière instaurée en 2018 dans l'espoir de réduire les tensions et les risques d'incident armé entre les deux pays.
Un des missiles lancés mercredi matin a terminé sa course en mer à seulement 57 km de la ville sud-coréenne de Sokcho, dans le nord-est de la Corée du Sud, a indiqué l'armée sud-coréenne qui a qualifié de "très rare et intolérable" cette salve inédite.
Elle a annoncé dans la foulée avoir tiré, pour sa part, trois missiles air-sol près de la frontière maritime intercoréenne.
Le président Yoon a convoqué une réunion du Conseil national de sécurité au sujet de cet incident, l'un des plus agressifs depuis plusieurs années, estiment des analystes. Le président sud-coréen a en outre ordonné des mesures "rapides et sévères afin que la Corée du Nord paie un prix fort pour ses provocations".
La Corée du Sud a fermé plusieurs routes aériennes au-dessus de la mer du Japon, conseillant aux compagnies aériennes d'effectuer un détour pour "assurer la sécurité des passagers sur les routes en direction des États-Unis et du Japon"
Exercice militaire conjoint de Séoul et Washington
Séoul et Washington organisent actuellement le plus grand exercice aérien conjoint de leur histoire, baptisé "Tempête vigilante" (Vigilant Storm), auquel participent des centaines d'avions de guerre des deux armées.
Pak Jong Chon, maréchal et secrétaire du Parti des travailleurs au pouvoir en Corée du Nord, a qualifié ces exercices d'agressifs et provocants, a rapporté mercredi la presse officielle nord-coréenne.
Selon lui, le nom de ces manœuvres fait écho à l'opération "Tempête du désert", nom donné aux opérations militaires de la coalition conduite par les États-Unis contre l'Irak en 1991 après l'invasion du Koweït.
"Si les États-Unis et la Corée du Sud tentent d'utiliser leurs forces armées contre la (République populaire démocratique de Corée) sans crainte, les moyens spéciaux des forces armées de la RPDC accompliront leur mission stratégique sans délai", a déclaré Pak Jong Chon, selon l'agence d'État KCNA.
"Les États-Unis et la Corée du Sud devront (...) payer le prix le plus horrible de l'histoire", a menacé le maréchal.
Risque d'un nouvel essai nucléaire
Les missiles tirés mercredi par la Corée du Nord constituent "la plus agressive et menaçante démonstration (de force) contre le Sud depuis 2010", a déclaré à l'AFP Cheong Seong-chang, chercheur à l'institut Sejong. "Il s'agit d'une situation dangereuse et instable qui pourrait mener à des (affrontements) armés", a-t-il ajouté.
Les tirs de mercredi surviennent après une autre longue série en septembre et octobre, que le Nord a qualifié d'exercices nucléaires tactiques.
Washington et Séoul avertissent de manière répétée que Pyongyang pourrait effectuer un nouvel essai nucléaire qui serait le 7e de son histoire.
"Aussi longtemps que je me souvienne, la Corée du Nord n'a jamais procédé à une telle provocation lorsque la Corée du Sud et les États-Unis menaient des manœuvres conjointes", a décrit à l'AFP Park Won-gon, professeur à l'université Ewha. "Pyongyang semble avoir achevé sa plus puissante (mesure de) dissuasion. C'est une grave menace. Le Nord semble également confiant dans ses capacités nucléaires."
Avec AFP