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Bras de fer politique en Irak : des pro-Sadr en sit-in devant le Conseil suprême de la magistrature

Plusieurs centaines de partisans du leader chiite irakien Moqtada Sadr ont entrepris mardi un sit-in devant la plus haute instance judiciaire à Bagdad, ont rapporté des médias et le Courant sadriste, alors que le pays est dans une impasse politique depuis les dernières législatives. 

Les tensions politiques s'intensifient en Irak. Quelques centaines de partisans du leader chiite irakien Moqtada Sadr ont entamé, mardi 23 août, un sit-in devant le Conseil suprême de la magistrature à Bagdad pour accentuer la pression sur leurs adversaires, en plein bras de fer sur l'avenir de l'Irak.

L'Irak, riche en hydrocarbures mais accablé par une grave crise économique et sociale, est dans une impasse totale depuis les législatives d'octobre 2021.

Depuis fin juillet, la tension est montée d'un cran entre les deux blocs du chiisme politique : le Courant de Moqtada Sadr qui réclame la dissolution du Parlement et des législatives anticipées et ses adversaires du Cadre de coordination, alliance regroupant des factions chiites pro-Iran, pressés de former un gouvernement.

Les deux blocs enchaînent joutes verbales et surenchères, sans toutefois laisser la situation basculer dans la violence.

Trublion de la vie politique, Moqtada Sadr a démontré sa capacité à mobiliser : depuis plus de trois semaines, ses partisans campent autour du Parlement dans la Zone Verte. Les sympathisants du clerc chiite ont brandi des affiches réclamant "la dissolution de l'Assemblée nationale" et une "lutte contre la corruption".

"Nous voulons l'éradication de la corruption", a dit à l'AFP Abou Karar al-Alyaoui ."Le système judiciaire est sous le coup de menaces ou bien alors il est corrompu". À la mi-journée, de la nourriture a été livrée aux manifestants, signe qu'ils comptent installer leur campement dans la durée.

Sit-in symbolique 

En réaction, le Cadre de coordination a monté son propre sit-in aux abords de ce quartier ultra-sécurisé qui abrite institutions gouvernementales et ambassades.

Mardi, les sadristes ont surenchéri en s'installant devant le Conseil suprême de la magistrature, bloquant l'entrée à la plus haute instance judiciaire de l'Irak où siège notamment la Cour suprême fédérale.

Le Premier ministre, Moustafa al-Kazimi, a décidé dans la foulée d'"écourter" une visite en Égypte, où il devait participer à un sommet avec quatre autres dirigeants arabes, et de rentrer à Bagdad pour "suivre la situation". Il a appelé au "calme" et au "dialogue", selon un communiqué de ses services.

Le sit-in devant le Conseil suprême est tout un symbole : début août, Moqtada Sadr avait sommé la justice irakienne de dissoudre le Parlement. En vain. Les juges s'étaient déclaré incompétents.

L'instance judiciaire a annoncé "la suspension" de ses travaux.

"Dialogue national"

S'accusant à qui mieux mieux de pousser l'Irak au bord de l'abîme, sadristes et partisans du Cadre de coordination s'affrontent sur les modalités de désignation du Premier ministre et du gouvernement.

La crise a débuté quand le Courant sadriste a refusé fin juillet le candidat du Cadre de coordination au poste de Premier ministre. Car dix mois après les législatives, l'Irak n'a toujours pas remplacé son chef de gouvernement, ni son président.

Le Cadre de coordination s'est dit ouvert à une dissolution votée par les députés, Moqtada Sadr, intransigeant, exige que la justice dissolve le Parlement... d'où le sit-in devant le Conseil suprême de la magistrature.

Le Premier ministre a convoqué la semaine dernière un "dialogue national" pour tenter de sortir l'Irak de l'ornière, une réunion boycottée par les représentants du Courant sadriste.

Mais Moqtada Sadr, auquel des centaines de milliers d'Irakiens obéissent au doigt à l'œil, réclame aussi un changement de la Constitution qui permettrait au gagnant du scrutin d'avoir le droit de former le gouvernement à sa guise – ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Son Courant était arrivé premier aux législatives d'octobre 2021 avec 73 sièges (sur 329). Mais, incapable de former une majorité dans l'hémicycle, Moqtada Sadr avait fait démissionner ses députés en juin.

Taxant ses adversaires de "corrompus", jouissant d'une aura de clerc, Moqtada Sadr est un habitué des actions coup de poing.

Bien qu'il dispose de relais dans la plupart des ministères et administrations irakiennes, ses partisans le voient comme un outsider, un "révolutionnaire" toujours prompt à lutter contre le "système corrompu" des élites.

Avec AFP