Barack Obama effectue sa première visite en tant que président des Etats-Unis en Chine. Cette tournée intervient dans un contexte commercial tendu : entre Pékin et Washington, les mesures de rétorsions se succèdent.
Les invités de ce Focus sont Joris Zilberman, correspondant de FRANCE 24 à Pékin, et Guillaume Daudin, chercheur associé rattaché à la présidence de l'OFCE.
A l’usine Jinyu, la taxe américaine sur les pneus chinois a pris la direction par surprise. Chez ce fabricant du Shandong, dans le nord-est de la Chine, personne n’aurait cru que Barack Obama imposerait une taxe de plus 30 %. Pour Jinyu, qui allait conclure un gros contrat avec des clients américains, c’est un violent coup d’arrêt. Aucun licenciement n’est encore prévu, mais pour survivre, il faut revoir la stratégie commerciale et trouver d’urgence de nouveaux marchés. "Les Américains ont suspendu les négociations pour un contrat avec nous, confie Jia Min, responsable de l’export. Forcément, maintenant ils préfèrent attendre. Nous produisons 16 000 pneus par jours. Sans cette nouvelle taxe, nous aurions exporté de 25 à 30 % de notre production…"
Comme d’autres fabricants, la direction de Jinyu reste persuadée que les clients américains finiront par revenir. Car dans le fond, les Chinois ne sont pas étonnés par la décision de l’administration Obama. Ici, personne n’ignore qu’un président démocrate est toujours plus enclin à protéger l’industrie et l’emploi aux Etats-Unis. Mais ce sont l’ampleur de la taxe et, surtout, la manière qui ont déplu.
"Ce fut très brutal, déplore Shi Yinhong, professeur de relations internationales à la Renmin University de Pékin. La veille, Obama accueille le président de l’Assemblée nationale chinoise à Washington, tout se passe bien… Et puis, le lendemain, il impose une taxe sur les pneus chinois qui est injustifiée. Cette façon d’agir ne convient pas du tout à une relation sino-américaine saine et stable…"
En réponse à la taxe sur les pneus chinois, la Chine a ouvert une enquête pour subventions excessives sur les voitures et le poulet américains. Peu de temps après, Washington a imposé une taxe sur les tubes en acier chinois. Et Pékin a répliqué par la sienne sur le nylon "made in USA". Bref, la partie de ping-pong semble hors de contrôle et ressemble de plus en plus à une guerre commerciale. Mais le mot reste encore tabou. "Nous ne pensons pas qu’il s’agisse d’une guerre commerciale… Il y a des terrains de discorde, mais nous avons confiance. La venue du président Obama va permettre aux deux pays d’aplanir leurs différences. Et surtout de faire en sorte que des différends commerciaux restent des différends commerciaux, et ne deviennent pas quelque chose de plus grave…"