Le texte veut être un "marqueur" du quinquennat Macron : l'Assemblée nationale entame lundi en séance plénière l'examen du projet de loi hautement sensible sur le renforcement de l'arsenal contre l'islamisme radical.
C’est un texte hautement sensible mais qui se veut être un "marqueur" du quinquennat du président français Emmanuel Macron. L’Assemblée nationale commence lundi 1er février l’examen et les débats autour du projet de loi "confortant le respect des principes républicains", qui renforce l’arsenal contre l’islamisme radical et "le séparatisme".
Après une cinquantaine d'heures d'auditions, puis autant pour le passage au crible des articles en commission spéciale, les députés vont débattre pour deux semaines sur ce texte "confortant le respect des principes républicains".
Face à l'islamisme radical "il faut aller plus loin, donner des outils supplémentaires à nos forces de sécurité, à notre système judiciaire, et avec ce projet de loi, on s'en donne les moyens", a déclaré dimanche 31 janvier le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, sur BFMTV.
Le sujet est toutefois délicat dans un pays où tout ce qui touche à la laïcité, au cœur du pacte républicain, continue d'enflammer les débats.
Débats houleux prévus avec les Insoumis, la droite et l’extrême-droite
Gouvernement et majorité ont jusqu'ici réussi à désamorcer les polémiques internes ou venues des oppositions de droite comme de gauche, comme par exemple sur la question du voile. "Le texte a été bien mené en amont et ça a créé un climat apaisé dans la forme. On a fait mentir ceux qui prédisaient que ça allait être une boucherie politique", se félicite un député LREM.
Dans les rangs du groupe majoritaire, l'heure est à un optimisme prudent. Mais "cela va reposer sur des individualités qui peuvent vouloir théâtraliser ou hystériser les débats", pronostique un parlementaire.
En ligne de mire : les élus LFI et Jean-Luc Mélenchon, opposés à un texte accusé de "stigmatiser les musulmans". Mais la majorité vise surtout la droite et l’extrême droite. Le patron des députés LR, Damien Abad, déplore que le projet fasse l'impasse sur la "question migratoire, la radicalisation dans nos prisons ou dans nos entreprises privées".
Les LR dévoileront mardi un contre-projet. Marine Le Pen a déjà présenté vendredi une contre-proposition de loi pour bannir les "idéologies islamistes" et interdire dans tout l'espace public le port du voile.
Batterie de mesures "techniques"
Côté gouvernement, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin pilote le projet de loi popularisé sous le concept de "lutte contre le séparatisme". Ses homologues de la Justice, Éric Dupond-Moretti, de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, ou Marlène Schiappa, chargée de la Citoyenneté, sont également attendus au banc.
Au menu, 70 articles, examinés selon un "temps législatif programmé" de quarante heures pour cadrer les débats (hors temps d'interventions des ministres et rapporteurs). Près de 2 650 amendements ont été déposés.
Le projet de loi prévoit une batterie de mesures souvent "techniques" sur la neutralité du service public, la lutte contre la haine en ligne, l'instruction en famille, le contrôle renforcé des associations, une meilleure transparence des cultes et de leur financement, et encore la lutte contre les certificats de virginité, la polygamie ou les mariages forcés.
Il doit traduire le discours d'Emmanuel Macron le 2 octobre aux Mureaux, où le chef de l'État avait présenté sa stratégie, longtemps attendue, pour lutter contre l'islam radical.
"Loi d'injonctions", dit-on à gauche
À gauche, on regrette la faiblesse du volet social et des mesures de lutte contre les discriminations. "Au final, le projet de loi est borgne, car il ne traite pas de la ségrégation, du séparatisme social, territorial, de la mixité scolaire", déplore le communiste Stéphane Peu.
"C'est une loi d'injonctions. Elle ne fait vivre en acte aucun des principes de la République", souligne par ailleurs le député socialiste Boris Vallaud.
Ce constat critique trouve un écho jusqu'à l'aile gauche de LREM. Plusieurs députés comme Souad Zitouni ou les membres d'En Commun rappellent que la "lutte contre les discriminations et les inégalités" font également partie de la "promesse républicaine".
Le gouvernement, qui a annoncé vendredi 2 milliards d'euros pour les banlieues, fait valoir un futur plan en faveur de l'égalité des chances. Le chef de file des députés LREM, Christophe Castaner, assure que son groupe sera "très massivement en soutien".
La majorité devra cependant veiller à trouver un équilibre sur les nouvelles modalités de financement des cultes et surtout l'instruction en famille (IEF) qui fait l'objet de 384 amendements, un record sur ce texte.
Avec AFP