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Politique française : une année 2020 sous le signe du Covid-19

Si la pandémie de coronavirus a dominé l’année 2020, la vie politique française a également connu son lot de faits marquants avec, notamment, les élections municipales à la veille du confinement ou la nomination de Jean Castex à Matignon.

Le Covid-19 a dominé la vie politique de la France en 2020, obligeant le gouvernement à répondre à une double crise, sanitaire et économique. Mais d'autres événements ont rythmé cette année particulière, une nouvelle fois marquée par la contestation du pouvoir.

  • La réforme des retraites imposée puis stoppée net

C'est par d'importantes manifestations contre la réforme des retraites que débute 2020. La contestation, entamée en décembre 2019 par la grève des agents SNCF et RATP, se poursuit jusqu'en février, devenant le plus important mouvement social en France depuis les manifestations contre la réforme des retraites de 2010. Face à une opposition ayant décidé de faire durer le plus longtemps possible les débats à l'Assemblée nationale, le gouvernement finit par utiliser l'article 49-3 de la Constitution, samedi 29 février, pour faire passer son texte sans vote des députés.

Finalement, la pandémie de coronavirus empêche la réforme des retraites de poursuivre son parcours législatif. L'exécutif décide en mars de suspendre son examen pour se consacrer pleinement à la crise sanitaire. Et si le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, dit encore espérer voir la réforme aboutir avant la fin du quinquennat, aucune autre voix au sein du gouvernement ne s'est ajoutée à la sienne.

  • Municipales, acte 1

La campagne des élections municipales, prévues à l'origine les 15 et 22 mars, est émaillée de rebondissements. Le plus marquant d'entre eux est sans aucun doute l'abandon, en février, du candidat de La République en marche à Paris, Benjamin Griveaux, dont des vidéos intimes ont été diffusées sur Internet quelques jours auparavant. Son remplacement dans l'urgence par Agnès Buzyn, la ministre de la Santé d'alors, obligée de quitter le gouvernement alors que la pandémie de coronavirus commence à sévir en France, n'empêche pas la déroute du parti présidentiel dans la capitale. La maire socialiste sortante, Anne Hidalgo, et la candidate Les Républicains, Rachida Dati, arrivent en tête au premier tour.

La dernière semaine de campagne est par ailleurs dominée par les annonces successives d'Emmanuel Macron et d'Édouard Philippe concernant le Covid-19 : la fermeture des écoles le jeudi 12 mars, puis deux jours plus tard, à la veille du premier tour des municipales, celle de tous les "lieux recevant du public non indispensables à la vie du pays" et un confinement généralisé à partir du 17 mars. De nombreux Français font alors le choix de ne pas se rendre aux urnes.

  • Le gouvernement face à la crise sanitaire

La première vague de Covid-19 prend par surprise le gouvernement, dont l'impréparation sera sévèrement pointée du doigt en décembre par des enquêtes de l'Assemblée nationale et du Sénat. L'exécutif – et tout particulièrement le ministère de la Santé – est mis en cause pour ne pas avoir renouvelé les stocks stratégiques de masques. La communication du gouvernement à ce sujet est, au mieux, maladroite. Il est dans un premier temps expliqué aux Français que porter un masque est inutile. Puis le port de celui-ci est rendu obligatoire durant l'été. Dans les hôpitaux, il manque des lits en réanimation, des respirateurs et certains médicaments essentiels.

Emmanuel Macron affirme toutefois, le 12 mars, que tous les moyens nécessaires seront mis en œuvre pour protéger les Français, et cela "quoi qu'il en coûte". Sur le front économique, le chômage partiel est mis en place pour des millions de Français – jusqu'à 8,6 millions en avril – et des aides financières sont apportées aux entreprises. Ces mesures n'empêchent toutefois pas la pauvreté de gagner du terrain. Huit semaines après sa mise en place, le confinement prend fin le 11 mai et les Français retrouvent peu à peu leur quotidien. Mais les contaminations repartent à la hausse à la fin de l'été – la campagne de tests et le traçage des cas contacts sont cette fois-ci jugés peu efficaces – et un nouveau confinement généralisé est instauré du 29 octobre au 15 décembre. Emmanuel Macron sera testé positif le 17 décembre.

  • Municipales, acte 2

Le deuxième tour des élections municipales se tient finalement le 28 juin après une drôle de campagne, soit deux mois et demi après le premier tour. Les écologistes l'emportent dans plusieurs grandes villes – Lyon, Marseille, Bordeaux, Strasbourg notamment – et sont également des alliés décisifs de la maire sortante à Paris. Au-delà de cette "vague verte", la déroute du parti présidentiel, La République en marche, marque les esprits : aucune victoire dans les grandes villes et plusieurs revers lorsque le candidat LREM s'allie avec Les Républicains pour faire barrage à Europe Écologie-Les Verts. La victoire au Havre du Premier ministre, Édouard Philippe, est un des rares motifs de satisfaction pour la majorité.

  • Les 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat

Mise en place à l'automne 2019 par Emmanuel Macron, la Convention citoyenne pour le climat regroupe 150 citoyens tirés au sort et chargés de formuler des propositions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre en France d'au moins 40 % d'ici 2030, par rapport à 1990, le tout dans un esprit de justice sociale. "Les 150" remettent le 21 juin 149 propositions au président de la République, qui s'engage le 29 juin, lors d'une réception des "conventionnels" à l'Élysée, à les reprendre toutes, à l'exception de trois d'entre elles. Mais plusieurs ministres rejettent d'autres mesures dans les mois qui suivent, tandis que certaines sont reprises mais édulcorées. Le moratoire sur la 5G symbolise le décalage entre le discours d'Emmanuel Macron devant les 150 conventionnels et ses actes : il s'y oppose en septembre, ironisant au passage sur les défenseurs du "modèle amish".

Les derniers espoirs des membres de la Convention pour le climat sont douchés, le 14 décembre, lors d'une rencontre avec le chef de l'État. Ce dernier leur annonce qu'il recule sur plusieurs propositions clés, dont l'obligation de rénovation globale des bâtiments ou l'interdiction de vente des véhicules les plus polluants. Emmanuel Macron accepte en revanche de proposer un référendum pour inscrire la défense du climat et la préservation de l'environnement dans la Constitution.

  • Jean Castex nommé Premier ministre

Haut fonctionnaire inconnu du grand public, nommé au printemps "M. Déconfinement" du gouvernement, Jean Castex devient Premier ministre le 3 juillet en remplacement d'Édouard Philippe. Ce changement à la tête du gouvernement est accompagné de plusieurs mouvements ministériels : Gérald Darmanin arrive notamment à l'Intérieur et Éric Dupond-Moretti à la Justice. Ces deux nominations passent mal auprès des féministes : le premier est accusé de viol, le second d'avoir tenu des propos sexistes.

  • Un plan de relance à 100 milliards d'euros

Pour lutter contre la crise économique créée par la crise sanitaire, le Premier ministre présente le 3 septembre un plan de relance à 100 milliards d'euros. Celui-ci repose sur trois piliers : 36 milliards d'euros pour la cohésion des territoires, 34 milliards d'euros pour la compétitivité des entreprises et 30 milliards d'euros pour la transition écologique.

Un rapport du Haut Conseil pour le climat (HCC), publié le 15 décembre, juge toutefois que le plan de relance de la France n'est pas assez vert. Le HCC affirme notamment que le gouvernement ne va pas assez loin dans ses objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre. Il estime également que les investissements promis ne s'inscrivent pas assez dans une stratégie à long terme de neutralité carbone, que la France s'est pourtant engagée à atteindre en 2050.

  • La République en marche se fissure

Ultra-majoritaire à l'Assemblée nationale, avec 314 députés, après les élections législatives de juin 2017, le groupe La République en marche se fissure un peu plus chaque année. Ce sont surtout les membres de son aile gauche qui partent les uns après les autres. Le départ de sept élus, en mai, a fini par faire perdre la majorité absolue à LREM, qui ne compte aujourd'hui plus "que" 270 députés.

D'autres défections pourraient survenir puisque les tensions sont fortes à l'intérieur du parti. La lourde tâche de pacifier les relations et de garder une cohésion de groupe revient à l'ancien ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, élu en septembre patron du groupe LREM en remplacement de Gilles Le Gendre.

  • Une loi "sécurité globale" qui ne passe pas

La proposition de loi "sécurité globale" présentée en novembre à l'Assemblée nationale, et en particulier son article 24 qui prévoyait de créer un délit pour la diffusion d'images "dans le but qu'il soit porté atteinte à l'intégrité physique ou psychique" d'un policier ou d'un gendarme, fait descendre de nombreux citoyens dans la rue. Les journalistes émettent leurs craintes de ne plus pouvoir filmer les forces de l'ordre lors de leurs interventions. Le texte est voté le 24 novembre par les députés, mais Emmanuel Macron demande à sa majorité, lors d'une réunion de crise à l'Élysée, de réécrire l'article controversé.

Au-delà de cette proposition de loi, c'est bien le sujet des violences policières qui revient alors en boucle. Longtemps dans le déni, l'exécutif change de rhétorique, lorsque Emmanuel Macron demande à son ministre de l'Intérieur "des propositions claires pour améliorer la déontologie" au sein des forces de l'ordre. Puis début décembre, dans un entretien avec le média en ligne Brut, le chef de l'État reconnaît qu'il existe "des violences par des policiers", avant d'annoncer la tenue d'un "Beauvau de la sécurité" en janvier.

  • Décès de Valéry Giscard d'Estaing

L'ancien président de la République (1974-1981) meurt le 2 décembre à 94 ans des suites du Covid-19. Valéry Giscard d'Estaing ne souhaitait pas d'hommage national, comme celui qui avait été organisé pour l'ancien président Jacques Chirac en septembre 2019. La France salue donc sobrement, une semaine plus tard, le 9 décembre, l'ex-chef de l'État avec la mise à disposition d'un livre d'or au musée d'Orsay, des drapeaux en berne et une minute de silence dans plusieurs institutions.

  • Une loi sur les "séparatismes" qui renforce le contrôle des religions

Le gouvernement présente le 9 décembre, en Conseil des ministres, son projet de loi sur les "séparatismes", finalement rebaptisé "projet de loi confortant les principes républicains". Près de deux mois après l'assassinat de Samuel Paty, enseignant d'un collège des Yvelines ayant montré à ses élèves, lors d'un cours sur la liberté d'expression, des caricatures de Mahomet, le texte entend répondre à la montée de l'islamisme radical. Le projet de loi prévoit notamment de restreindre l'instruction à domicile, de mieux contrôler le fonctionnement et le financement des associations et des lieux de culte, et de mieux encadrer la haine en ligne. Prévus pour début 2021, les débats au Parlement, qui mettront aux prises deux visions de la laïcité, s'annoncent houleux.