
Un appel à témoins a été lancé, mardi, par le procureur de Paris pour retrouver toute autre victime que Vanessa Springora, dont les faits sont prescrits, dans le cadre de l'enquête ouverte pour viols sur mineur de moins de 15 ans visant l'écrivain Gabriel Matzneff. Le siège de l'éditeur Gallimard, à Paris, a également été perquisitionné mercredi.
"Vous avez été victimes ou témoins d'agissements à caractère sexuel, susceptibles de concerner cette enquête, la police judiciaire tient à vous garantir qu'elle est mobilisée et se tient parfaitement disponible pour accueillir votre parole". Dans le cadre de l'enquête ouverte pour viols sur mineur de moins de 15 ans contre l'écrivain français Gabriel Matzeneff, le procureur de Paris, Rémy Heitz, a lancé mardi 11 février un appel à témoins. Le but : retrouver des victimes présumées.
L'appel à témoin indique un numéro de téléphone (06 83 67 43 57). "Quels que soient les délais, quelles qu'aient été les circonstances ou les personnes qui pourraient être impliquées, les policiers encouragent tou(te)s celles et ceux qui détiennent des informations à témoigner."
Un coffre avec des "passages" inédits et "scandaleux" saisi dans une perquisition
Le siège parisien de l'éditeur Gallimard, qui a publié son œuvre, a également été perquisitionné mercredi 12 février dans le cadre de la même enquête. Les enquêteurs de l'Office central de répression des violences aux personnes (OCRVP) recherchaient des passages écrits de l'écrivain ne figurant pas dans ses ouvrages publiés, selon une source de l'AFP.
Dans un entretien à l'ex-site Biffures, en 2008, Gabriel Matzneff déclarait avoir "autocensuré" des "passages" de ses écrits qui risquaient d'être "jugés spécialement scandaleux" et les avoir mis "en sécurité dans un coffre de banque". Selon Mediapart, ce coffre-fort a été "localisé" par les enquêteurs au cours de cette perquisition, qui a débuté mercredi matin et s'est achevée en tout début d'après-midi.
"Identifier toutes autres victimes éventuelles"
Mardi matin, Rémy Heitz avait annoncé sur Europe 1 qu'un appel à témoins serait lancé dans la journée pour éviter qu'il y ait des "victimes oubliées".
L'enquête avait été ouverte par le parquet le 3 janvier, au lendemain de la parution du roman autobiographique "Le Consentement" dans lequel l'éditrice Vanessa Springora dénonçait sa relation sous emprise avec l'écrivain Gabriel Matzneff quand elle était mineure, dans les années 80.
"Au-delà des faits décrits par Vanessa Springora", l'enquête s'attachera "à identifier toutes autres victimes éventuelles ayant pu subir des infractions de même nature sur le territoire national ou à l'étranger", avait déjà précisé M. Heitz dans son communiqué annonçant l'ouverture de l'enquête.
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L'éditrice a été entendue fin janvier par les enquêteurs mais les faits la concernant sont prescrits.
Outre la "manifestation de la vérité" et la vérification concernant la prescription des faits, "la démarche du parquet de Paris" quand il s'agit de mineurs, c'est de "faire en sorte" en ouvrant une enquête "qu'il n'y ait pas de victimes oubliées", a expliqué Rémy Heitz sur Europe 1.
"S'il y a eu d'autres victimes", il faut "leur permettre de s'exprimer, de prendre en compte leur parole et de poursuivre l'auteur des faits", a-t-il ajouté, expliquant la raison d'être de l'appel à témoins.
Vanessa Springora a été la première à témoigner parmi les adolescentes séduites par Gabriel Matzneff, dont le comportement, décrit dans ses propres livres, a longtemps été toléré dans le monde littéraire parisien. En 2013, il avait obtenu le prix Renaudot essai.
Gabriel Matzneff donne des noms
Dans une interview publiée mardi dans le New York Times, Gabriel Matzneff, 83 ans, s'emporte contre ceux qui veulent le juger. "Qui sont-ils pour juger leurs semblables ? Ces associations pour la vertu, comment couchent-elles, qu'est-ce qu'elles font au lit et avec qui couchent-elles, quels sont leurs désirs secrets et refoulés ?", demande l'écrivain interrogé par le quotidien américain sur la Riviera italienne, où il s'est réfugié depuis que l'affaire a éclaté.
Le quotidien rappelle qu'avant sa mise à l'index, l'écrivain avait été reçu à l'Élysée en 1984 par le président François Mitterrand, qu'il avait fréquenté Jean-Marie Le Pen ou encore qu'il avait bénéficié "des largesses" d'Yves Saint Laurent et de son compagnon Pierre Bergé.
Notre enquête dans le New York Times, en français, sur Gabriel Matzneff, l’écrivain poursuivi pour son éloge de la pédophilie, et l’élite qui l’a soutenu. Nous avons retrouvé l’écrivain, ostracisé, pour un long entretien sur la Riviera italienne. https://t.co/bGwfA63N2A
— Norimitsu Onishi (@onishinyt) February 11, 2020Dans une interview diffusée fin janvier sur BFMTV, il avait affirmé "regretter" ses pratiques pédophiles passées en Asie, tout en faisant valoir qu'"à l'époque", "jamais personne ne parlait de crime". Dans une lettre, il avait dit ne pas mériter "l'affreux portrait" publié par l'éditrice.
Avec AFP