Le président bolivien Evo Morales a dénoncé "un coup d'État en cours" et a déclaré l'état d'urgence, après la grève qui a éclaté mardi soir, alors que le pays attend encore les résultats officiels de l'élection présidentielle.
Son intervention était particulièrement attendue. Le président sortant Evo Morales, qui ne s'est pas exprimé depuis dimanche, a déclaré, mercredi 23 octobre lors d'une conférence de presse, qu'"un processus de coup d'État est en cours" alors qu'une grève générale a lieu depuis mardi soir, à l'appel de l'opposition.
"La droite a préparé [ce coup d'État] avec un soutien international", a-t-il affirmé lors de son discours avant de déclarer l'état d'urgence.
"Jusqu'à présent, humblement, nous avons supporté (cela) pour éviter des violences. (...) Nous n'entrerons pas dans une confrontation", a-t-il poursuivi. "Mais je veux appeler le peuple bolivien à se mobiliser de manière pacifique et dans le cadre de la Constitution, pour défendre la démocratie."
Depuis dimanche, le pays est dans l'attente des résultats de l'élection présidentielle et le comptage des voix fait polémique. Evo Morales s'est par ailleurs dit "totalement sûr" d'avoir remporté le scrutin dès le premier tour, "par plus de 500 000 voix".
Le lent décompte officiel des votes s'est poursuivi dans la nuit de mardi à mercredi. Pour éviter un second tour, le candidat en tête doit obtenir la majorité absolue ou au moins 40 % des suffrages et 10 points de pourcentage d'écart sur le deuxième.
Or, selon les derniers résultats officiels du dépouillement avec encore quelque 3 % seulement des bulletins restant à décompter, Evo Morales obtient 46,4 % des voix contre 37,07 % à son principal rival, le centriste Carlos Mesa, soit une avance inférieure aux 10 points nécessaires.
Grêve générale mercredi
Après de premiers résultats partiels, dimanche soir, pointant vers un second tour inédit entre Evo Morales et Carlos Mesa, de nouveaux résultats diffusés le lendemain par l'autorité électorale avaient donné quasiment la victoire au chef de l'État sortant, suscitant des soupçons de fraude de la part de l'opposition et des observateurs internationaux.
Le coup d'envoi de la grève nationale a été donné mardi soir dans l'est du pays par Luis Fernando Camacho, président de l'influent Comité Pro-Santa Cruz, une organisation de la société civile établie à Santa Cruz, capitale économique du pays et bastion de l'opposition.
C'est ici qu'ont éclatés mercredi des heurts entre manifestants pro et anti-Morales, faisant au moins deux blessés, selon l'AFP.
Carlos Mesa a appelé à une "mobilisation permanente" jusqu'à ce que le tribunal électoral reconnaisse "qu'un second tour doit avoir lieu". Le candidat rival a également annoncé qu'il apporterait des preuves de fraude electorale.
Bolivia, más polarizada que nunca. Unos gritan "fraude", otros "Evo ganó carajo"#Bolivia #20Octubre19 pic.twitter.com/gQdcKAy89g
Alice Campaignolle (@Al_Campaignolle) October 21, 2019Il avait donné jusqu'à mercredi midi aux autorités électorales pour confirmer qu'il y aurait un second tour.
En réponse, un groupe de syndicats ouvriers et paysans proches du pouvoir, la Conalcam, a enjoint à ses militants de défendre les résultats officiels et appelé à un rassemblement, mercredi, à La Paz, qui devrait être une démonstration de force en soutien à M. Morales.
Signe du malaise entourant le dépouillement, le vice-président du Tribunal suprême électoral bolivien (TSE), Antonio Costas, avait annoncé sa démission en critiquant le système de décompte.
Avec AFP et Reuters