
Des députés de la France insoumise ont reçu vendredi à l’Assemblé nationale des membres de la coalition ivoirienne pro-Laurent Gbagbo. Les militants de l’ancien président sont en quête d’appuis internationaux avant la présidentielle de 2020.
C’est le député de Seine-Saint-Denis, Éric Coquerel, qui a accueilli vendredi 14 juin, au nom de la France insoumise, les membres de la coalition ivoirienne pro-Gbagbo EDS (Ensemble pour la démocratie et la souveraineté) à l’Assemblée nationale.
Les militants qui accompagnaient Georges Armand Ouégnin, le président d’EDS, étaient venus chercher auprès du parti d’extrême gauche français un soutien dans l’espoir d’obtenir le retour de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé en Côte d’Ivoire.
Depuis leur acquittement par la Cour pénale internationale (CPI) en janvier dernier, l’ex-président et l’ex-ministre de la jeunesse sont en liberté conditionnelle en Europe et ne sont pas autorisés à se rendre dans leur pays.
"Nous demandons trois choses, a détaillé Éric Coquerel, contacté par France 24. Le retour de Laurent Gagbo, le retour des exilés et la libération des prisonniers politiques ainsi que la mise en place de mesures permettant d’avoir des élections démocratiques."
Alors que l’élection présidentielle ivoirienne doit se tenir en 2020, l’urgence, pour les militants d’EDS, est à la réconciliation nationale. Face aux députés de la France insoumise, Georges Armand Ouégnin a exprimé vendredi ses inquiétudes concernant les violences communautaires dans le pays, rapporte RFI.
"Nous sommes inquiets parce que ces violences nous ont permis de constater qu'il y a des armes qui circulent et ça c'est extrêmement inquiétant à dix-huit mois des élections. Et cela veut dire quoi ? Nous, on doute de l'efficacité de ce que l'on appelait le DDR, Démobilisation Désarmement Réinsertion, qui a englouti des milliards", a-t-il déclaré.
"La réconciliation nous semble indispensable : pas de justice de vainqueur, mais pas non plus de justice de revanche", a, de son côté, indiqué Éric Coquerel sur Twitter dans une série de messages concernant la visite de la coalition ivoirienne.
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????????C’est une première depuis 2011 : j’ai aujourd’hui eu l’honneur de recevoir à l’Assemblée une importante délégation de l’opposition ivoirienne (plateforme EDS), menée par Georges Armand Ouégnin ! pic.twitter.com/9kscLvKaCr
"Longue camaraderie militante"
Interrogé sur les raisons de cette prise de position de La France insoumise dans la politique ivoirienne, le député explique : "Nous sommes internationalistes donc, à certains moments, on travaille en lien avec des forces dans d’autres pays. En Côte d’Ivoire, c’est avec la coalition EDS parce que c’est la plateforme de la gauche progressiste. Cela nous semble tout à fait normal."
Emmanuel Dupuy, président de l’Institut prospective et sécurité en Europe, spécialiste des questions euro-africaines, rappelle, quant à lui, que "si La France insoumise (LFI) n’appartient plus au Parti socialiste (PS), il y a toujours eu une longue camaraderie militante entre le Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo et le PS au sein de l’internationale socialiste".
En 2010-2011, lors de la crise post-électorale ivoirienne, Jean-Luc Mélenchon avait d’ailleurs fortement critiqué le soutien que Nicolas Sarkozy avait accordé à Alassane Ouattara, l’adversaire de Laurent Gbagbo.
Néanmoins, selon le chercheur, c’est surtout l’approche de l’élection présidentielle de 2020 qui motive les récentes rencontres entre LFI et l’EDS. "Il y a aujourd’hui une recomposition politique autour de la mémoire d’Houphouët-Boigny et le renouvellement dans le camp présidentiel [d'Alassane Ouattara, au pouvoir depuis 2011, NDLR] pourrait faire le jeu du FPI", explique-t-il.
La rencontre entre La France insoumise et l’EDS de vendredi n’était dans tous les cas pas la dernière. "Nous nous sommes séparés en se disant que l’on allait se revoir", assure Éric Coquerel.