Appel rejeté par la justice birmane pour les deux reporters de Reuters, condamnés à sept ans de prison pour violation de la législation sur les secrets d'État. Ils enquêtaient sur des exactions à l'encontre de la minorité musulmane rohingya.
Un tribunal de Birmanie a confirmé en appel, vendredi 11 janvier, la condamnation à 7 ans de prison des deux journalistes de Reuters pour violation de la législation sur les secrets d'État.
La justice birmane a estimé que "le verdict qui a été rendu en première instance n'était pas erroné et était conforme aux lois en vigueur". La défense des deux reporters peut désormais se pourvoir devant la Cour suprême.
Les deux journalistes birmans, Wa Lone, 32 ans, et Kyaw Soe Oo, 28 ans, ont été condamnés en septembre 2018 pour détention de secrets d'État alors qu'ils enquêtaient sur le massacre de dix Rohingya (musulmans apatrides) au cours d'une opération de l'armée menée un an plus tôt dans l'ouest de la Birmanie.
Ils sont accusés de s'être procurés des documents relatifs aux opérations des forces de sécurité birmanes dans l'État d'Arakan, région du nord-ouest de la Birmanie, théâtre du drame rohingya. Ils assurent de leurs côtés qu'on leur a tendu un piège.
Depuis, l'armée birmane a reconnu qu'un massacre avait bien eu lieu en septembre 2017 et sept militaires ont été condamnés à dix ans de prison.
Vives tensions avec la communauté internationale
Ce deuxième verdict devrait accentuer les tensions déjà vives entre la communauté internationale et la Birmanie.
Les autorités birmanes doivent "corriger cette injustice", en graciant les deux hommes, a réagi à la sortie du tribunal l'ambassadeur de l'Union européenne en Birmanie, Kristian Schmidt.
"La justice birmane montre qu'elle est déterminée à punir Wa Lone et Kyaw Soe Oo alors qu'ils n'ont fait que leur métier", a déploré de son côté Daniel Bastard, représentant de l'ONG Reporters sans frontières, mettant en garde contre un verdict qui pourrait être "dévastateur" pour l'image du pays.
Pour Amnesty International, cette décision a comme unique but de "tenter de dissimuler les exactions commises dans l'Etat Rakhine".
Une armée toujours aussi influente
Malgré l'arrivée au pouvoir en 2016 du gouvernement civil de la Prix Nobel de la Paix, Aung San Suu Kyi, les militaires, au pouvoir pendant des décennies, continuent de tirer de nombreuses ficelles. "Ils n'ont pas été emprisonnés parce que c'étaient des journalistes, mais parce que le tribunal a décidé qu'ils avaient enfreint la loi", a-t-elle déclaré le 13 septembre 2018.
Wa Lone et Kyaw Soe Oo ont été désignés, aux côtés de plusieurs confrères, personnalités de l'année 2018 par le magazine Time.
Avec AFP et Reuters