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Ebola a fait plus de 300 morts en RD Congo depuis que l'épidémie a repris en août. L'insécurité rend difficile la lutte contre la maladie, mais celle-ci devrait faire moins de morts qu'en 2014.
Depuis la résurgence de l’épidémie dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) en août, le virus Ebola a tué plus de 300 personnes. "Il y a eu 303 décès (255 confirmés et 48 probables) et 179 personnes guéries", indiquait le bulletin du ministère de la Santé de RDC le 13 décembre.
Cette épidémie d'Ebola, la dixième sur le sol congolais, s'est déclarée le 1er août à Beni dans la province du Nord-Kivu (est) et aux marges de l'Ituri (nord-est).
"L’accélération des contaminations, dans l’est de la RDC comme dans d’autres secteurs récemment touchés telle la province de l’Équateur, est sans doute due au fait que les hommes s’approchent de plus en plus des forêts, où la maladie est transmise par des animaux infectés, comme les chauves-souris", explique Laurence Sailly, coordinatrice d’urgence de Médecins sans frontières (MSF) au Nord-Kivu, contactée par France 24. Elle évoque également le bon état du réseau routier dans cette partie du pays : "Énormément de personnes se déplacent le long de ces routes, ce qui peut expliquer la propagation de l’épidémie entre des zones qui peuvent sembler difficiles d’accès."
Rapide réponse internationale
En 2014, l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest avait tué plus de 11 000 personnes, principalement en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia.
Les soignants ne misent cependant pas sur un phénomène d’une telle ampleur en RDC. " Il est difficile de faire des prédictions, mais je ne crois pas à un scénario semblable à celui de 2014, qui a vu trois pays touchés rapidement, et une épidémie durer presque deux ans… Nous sommes actuellement dans le cinquième mois d’épidémie et elle est pour l’instant circonscrite au Nord-Kivu et à l’Ituri, dans l’est du pays, ce qui est bon signe ; la frontière avec l’Ouganda est par ailleurs très surveillée pour éviter la propagation vers l’Est."
Un point de vue partagé par Mosoka Fallah, directeur de l’Institut national de santé publique du Liberia, qui fut au cœur de la lutte contre le virus durant les deux années où il a sévi dans le pays. Joint par France 24, il estime qu’en RDC, l’épidémie a pu être vite détectée et a bénéficié d’une réaction internationale rapide grâce à l’action de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) notamment, ce qui laisse espérer un bilan moins meurtrier.
"Ebola n’a pas encore atteint des centres urbains ou des bidonvilles trop densément peuplés, où le risque de propagation est plus élevé", poursuit-il. Le seul centre urbain important touché à ce jour est la ville de Butembo – 300 000 à 400 000 habitants selon MSF, où la moitié des contaminations ont eu lieu, selon l’ONG.
Mais ce qui devrait empêcher l’épidémie d’atteindre les ravages de 2014, jugent Mosoka Fallah et Laurence Sailly, c’est l’usage massif du vaccin expérimental contre Ebola, déployé dès le début des contagions. Selon MSF, à ce jour, plus de 42 200 personnes ont bénéficié de cette vaccin qui, pour efficace qu’il soit, ne garantit pas à 100 % une non-contamination.
Certaines avancées dans le traitement peuvent contribuer à une réponse plus rapide et plus efficace face à l’épidémie, explique également MSF dans une note consacrée au sujet. "Par exemple, les échantillons sanguins de patients suspectés d’être atteints d’Ebola sont désormais examinés dans un laboratoire installé au sein même des centres de traitement d’Ebola. Cela permet aux équipes de réagir plus vite aux changements d’état des patients", peut-on y lire.
"C’est également la première fois que cinq nouveaux médicaments sont utilisés pour soigner des patients atteints d’Ebola en RDC et la présence d’une capacité d’analyse en laboratoire sur place nous permet d’offrir ces nouveaux traitements aux patients confirmés dans les 24 heures après le test positif au virus", explique l’ONG.
"La situation de conflit nous force à être plus créatifs"
Mais le nerf de la guerre, c’est la détection des personnes exposées au virus. Le 12 décembre, le ministère de la Santé a relevé que les équipes de surveillance de Goma, capitale du Nord-Kivu d'environ un million d'habitants, étaient à la recherche de six personnes, trois adultes et trois enfants, qui avaient été en contact avec un cas confirmé de Beni, épicentre de l'épidémie.
Toutes ces personnes ont finalement été retrouvées et les tests de laboratoire se sont révélés négatifs. Ces personnes continuent à être suivies, selon les autorités.
Sur place, le travail de dépistage peut être compliqué par le fait que la région est en proie à des conflits violents. Car la zone forestière du Nord-Kivu est le fief de plusieurs groupes armés qui s’opposent à l’autorité congolaise.
"La situation de conflit n’empêche pas l’intervention mais la rend plus compliquée et nous force à être créatifs : quand les conditions de sécurité ne sont pas réunies, nous déployons d’autres stratégies pour identifier les patients", explique Laurence Sailly. "Quand il est trop difficile de se déplacer, on suit cela à distance. On demande aux responsables des communautés de nous présenter des gens que l’on forme – comment procéder à des enterrements sans risque de contamination, comment décontaminer les maisons, par exemple. On leur donne également du matériel et on reste en contact avec eux", détaille-t-elle.
Manque de confiance envers les autorités
La prévention est plus difficile en zone de conflit, renchérit Mosoka Fallah. "Dans ces aires où l’on trouve des combattants actifs, les gens se sentent négligés par les autorités et ne leur font pas forcément confiance pour traiter les problèmes de santé. Ils peuvent se tourner vers des médecines traditionnelles plutôt que vers la médecine moderne lorsqu’ils sont infectés."
Pour lui, lutter plus efficacement contre l’épidémie passe par une collaboration accrue avec la population. "Il faut que tous soient impliqués dans la prévention et dans la détection de cas, et cela implique les rebelles de la zone, qui doivent eux aussi rejoindre les équipes qui luttent contre Ebola."
Alors qu'un tiers des personnes infectées sont des enfants, les autorités congolaises se sont réjouies jeudi de la guérison d'un nourrisson sorti du Centre de traitement d'Ebola (CTE) de Beni le 12 décembre .
"Cette jeune miraculée, née le 31 octobre 2018, a été admise à l'âge de six jours au CTE après que sa mère, un cas confirmé d'Ebola, est décédée lors de l'accouchement", précise le ministère de la Santé dans son bulletin.
????????La plus jeune guérie d'#Ebola est sortie du Centre de Traitement d'Ebola de #Beni. Elle a été admise alors qu'elle n'avait que 6 jours.
Les pédiatres, les réanimateurs et les nounous du CTE se sont relayés à son chevet 24/24 pour lui donner toutes les chances de survivre. pic.twitter.com/djyvXxdNyt