
Le président italien Sergio Mattarella a entamé mercredi les négociations pour former un nouveau gouvernement. Après le résultat peu concluant des élections de mars, l'issue la plus probable est un rapprochement entre les deux partis contestataires.
Bricoler une coalition. Un mois après les élections législatives en Italie, le premier tour des consultations avec les principaux représentants des partis politiques ont débuté, mercredi 4 avril, sous l’égide du président Mattarella. Le scrutin du 4 mars a entraîné un séisme politique dans le pays, écartant les partis conventionnels de gauche et de droite qui se sont relayés au pouvoir ces dernières années.
Tous les yeux sont tournés vers les deux gagnants : le Mouvement 5 Étoiles (M5S), désormais indiscutablement la force politique dominante en Italie, et le parti anti-immigration Lega (la Ligue), qui a dépassé la Forza Italia de Silvio Berlusconi pour devenir la grande force de droite. Les deux partis ont affirmé avoir été plébiscités pour former un gouvernement, mais aucun n’a la majorité au Parlement. Il manque 90 sièges à l’Assemblée au M5S, qui a obtenu 32 % des voix, et 50 à l’alliance des quatre partis de droite menée par la Ligue. Pour la première fois depuis qu’il est entré en politique il y a 25 ans, Berlusconi est un partenaire mineur dans cette alliance, avec les 13 % de voix de Forza Italia. Il a été contraint de se mettre en retrait pour laisser le trublion chef de la Ligue, Matteo Salvini, représenter la coalition.
L'autre gros perdant est le Parti démocrate (centre-gauche), au pouvoir jusqu'aux élections de mars, qui a perdu les deux tiers de ses élus et a été mis sur la touche pour les négociations post-électorales.
"Coalition de la colère"
Étant donné le manque d’options sur la table, une alliance entre le M5S et la Ligue s’est présentée comme le scénario le plus probable – ou le moins improbable – pour former une majorité. Surnommée la "coalition de la colère" et le "scénario cauchemar" de l’Union européenne, cette alliance serait une coalition pour le moins gênante. Le M5S tire la plus grande partie de ses soutiens dans le Sud pauvre de l’Italie, frappé par le chômage et la corruption, et où les électeurs veulent plus d’aides de l’État. La Ligue, d’un autre côté, est populaire chez les dirigeants de PME du Nord, qui réclament moins de paperasse et une baisse tes taxes.
Mais les deux factions ont aussi des points de convergence, notamment la réforme de la retraite et la réduction du pouvoir exercé par l’Union européenne dans la péninsule. Surtout, ils incarnent le changement pour lequel les Italiens ont voté. À eux deux, le M5S et la Ligue pourraient avoir la majorité des sièges au Parlement. Leurs chefs respectifs ont dicté le rythme des discussions et ont mis de côté les partis traditionnels en désignant les présidents des deux chambres du Parlement, ce qui est un indicateur typique de la nouvelle répartition du pouvoir après une élection. Les sondages publiés depuis suggèrent que la popularité des deux partis est toujours en hausse, et qu'une alliance entre les deux est plébiscitée.
L'encombrant Berlusconi
Mais avec sa condamnation pour fraude fiscale et son historique de débauche, Berlusconi est l’un des principaux obstacles à une alliance entre le M5S et la Ligue. À 81 ans, il a un demi-siècle de plus que le chef du M5S Luigi Di Maio, qui a déclaré qu’il ne voulait pas entendre parler de l’encombrant ancien Premier ministre. Di Maio a en effet exhorté la Ligue de se débarrasser de Berlusconi, faute de quoi l’accord serait caduc. Une exigence que le leader de la Ligue, qui doit compter sur une droite unie pour peser dans les négociations, peine à satisfaire.
L’ancien "Cavaliere", qui s’oppose logiquement à une alliance avec Di Maio, aurait largement préféré un rapprochement entre le centre-droit et l’arrière-garde du Parti démocrate (PD), afin d’évincer le M5S du gouvernement. Cependant, le dirigeant sortant du PD, Matteo Renzi, a prévenu que toute tentative de jouer un rôle mineur dans une coalition contre nature signifierait la fin du PD.
Néanmoins, le PD a tout juste le nombre d’élus pour donner au parti anti-establishment une majorité au Parlement, mais la plupart d’entre eux soutiennent Renzi. De plus, l’ancien parti au pouvoir a été laissé pour compte depuis son désaveu du 4 mars.
Adapté de l'anglais par Rémi Carlier. Cliquez ici pour lire l'original.