C'est une première : la galaxie "DF2", récemment découverte, serait pratiquement dépourvue de matière noire – une matière mystérieuse et invisible que l'on pensait indispensable à la formation de tels univers.
Il y a quelques jours, une aurore boréale à l'apparence inédite – baptisée "Steve" – était découverte par des amateurs au Canada. Désormais, c'est au tour de "DF2" d'impressionner les scientifiques : en effet, cette galaxie ne contiendrait quasiment aucune matière noire, un cas inédit en matière d'astronomie.
Bien que la matière noire soit étudiée par des scientifiques depuis près d'un siècle, sa composition et son rôle restent une énigme. Énigme qui représenterait tout de même 27 % de la masse et de la densité d'énergie totales de l'Univers. Contrairement à la "matière ordinaire", autrement dit les étoiles, les planètes et la poussière, elle n'émet pas de lumière, et est donc invisible. Ce sont surtout ses effets gravitationnels sur les objets qui l'entourent qui ont permis sa détection.
Une découverte exceptionnelle qui ouvre un nouveau champ des possibles quant à la distribution de la matière dans le cosmos
Il s'avère que dans chacune des galaxies étudiées jusqu'alors, un large pourcentage de matière noire était détecté. Mais aujourd'hui, à 65 millions d'années-lumière de la Terre, il semblerait donc qu'une galaxie en soit presque totalement dépourvue. Une découverte exceptionnelle qui ouvre un nouveau champ des possibles quant à la distribution de la matière dans le cosmos. "Nous avions toujours pensé que partout où l'on voyait des étoiles, on voyait de la matière noire", explique Pieter van Dokkum, professeur d'astronomie et de physique à l'université de Yale et auteur principal de l'étude publiée Nature (à cette heure indisponible sur le site). "On estimait ainsi qu'une galaxie ne pouvait se former sans matière noire, mais apparemment, celle-ci n'est pas obligatoire."
L'équipe de scientifiques dirigée par Pieter van Dokkum s'est donc penchée sur cette galaxie pour mesurer les vitesses de dix de ses amas globulaires, contenant des millions d'étoiles chacuns. Ils ont alors constaté qu'ils étaient en mesure de supporter leur vitesse de rotation sans l'aide de matière noire. La galaxie aurait donc "au moins 400 fois moins de matière noire que ce l'on pensait, déclare-t-il, mais brille autant que n'importe laquelle de ses voisines".
Une galaxie dépouillée de matière noire par une voisine ?
Baptisée "NGC1052-DF2" mais surnomée "DF2", cette nouvelle galaxie a de quoi interroger les atrophysiciens. "Nous pensions que la matière noire s'accumulait, que du gaz s'intégrait à l'intérieur pour ensuite devenir étoile, et ainsi de suite jusqu'à former une galaxie", explique l'astrophysicien Jeremiah Ostriker – qui n'a pas été impliqué dans l'étude – à Wired. L'absence quasi-totale de matière noire remet donc en question toutes les théories autour de la formation des galaxies évoquées ces dernières décennies. "Comment se forme une telle chose ?", s'interroge Pieter van Dokkum, avant d'ajouter : "Trouver une galaxie sans matière noire est un oxymore."
Pour le moment, les scientifiques ne souhaitent pas jeter aux oubliettes le peu d'informations collectées jusqu'ici à propos de la matière noire. De fait, plusieurs théories sont évoquées, notamment par le scientifique James Bullock de l'Université de Californie, qui estime que la galaxie s'est bien formée sur une "mer de matière noire", mais qu'une voisine l'aurait dépouillée pour pouvoir se former à son tour.
Funfact : en 2016, Pieter Van Dokkum avait découvert "Dragonfly 44", une galaxie contenant tellement de matière noire (plus de 99,99 %) qu'elle était en quelque sorte l'exacte opposée de "DF2". Un mystère également non-résolu à ce jour.
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