logo

Le destin de Mireille Knoll, sauvagement assassinée parce qu’elle était juive, selon la justice française et Emmanuel Macron, a ému l’opinion. Cette dame douce de 85 ans, profondément marquée par la guerre, menait une vie modeste à Paris.

Échapper à la Shoah et finir assassinée en 2018, à Paris, parce que juive. C’est le destin bouleversant de Mireille Knoll, une octogénaire poignardée à mort 11 fois et brûlée dans son appartement vendredi 23 mars. Ce mercredi 28 mars, une marche blanche était organisée en sa mémoire dans plusieurs villes françaises.

Dans cette affaire, le caractère antisémite a été retenu par la justice. Deux suspects ont été mis en examen pour "homicide volontaire à raison de l'appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion", mais également pour "vol aggravé par trois circonstances" et "dégradation du bien d'autrui par un moyen dangereux".

La vieille dame de 85 ans, mère de deux enfants, vivait depuis des années dans un logement social du 11e arrondissement de Paris. Elle souffrait de la maladie de Parkinson, se déplaçait difficilement et bénéficiait des services d’une garde-malade. Son fils, Alain Knoll, la décrit comme une dame "gentille, douce" et "appréciée par ses voisins, par les commerçants du quartier, [...] par les enfants". Sa petite-fille la décrit comme une "juive de cœur" mais non pratiquante, selon Le Monde. Elle a élevé ses fils au sein "d’une famille très ouverte, au contact de plein d’amis de toutes les religions".

Rescapée du Vel’ d’Hiv’

"C'est quelqu'un qui était plutôt enjouée", a témoigné Philippe, un voisin, sur Franceinfo. Elle était très gentille et paraissait ne pas avoir d'activités qui puissent la mettre en danger, a-t-il ajouté. "C'était quelqu'un d'extrêmement discret."

Mireille Knoll, née le 28 décembre 1932 à Paris, a traversé les pires moments de l’Histoire du XXe siècle. Elle a "vécu toute sa vie en essayant de profiter au mieux de ce que la vie pouvait lui réserver, parce qu'elle avait souffert pendant la guerre. Elle aimait vivre", rapporte son fils Alain sur BFMTV . L’octogénaire avait en effet échappé à la rafle du Vel' d’Hiv' en juillet 1942 durant laquelle plus de 13 000 juifs ont été déportés. Sa mère, qui possédait un passeport brésilien, a réussi à passer la ligne de démarcation et à se réfugier au Portugal.

Après la guerre, Mireille épouse un survivant du camp d’extermination d’Auschwitz, décédé au début des années 2000. Ils s’installent au Canada avant de revenir à Paris, rapporte Le Monde, où son mari tenait un atelier d’imperméables dans le quartier du Sentier. "Ils ont vécu dans le souvenir de ces jours-là, rapporte Georges-William Goldnadel, l'avocat de la famille, sur BFMTV. Mettez-vous à la place de leurs enfants, hantés par le souvenir de la Shoah, dont on tue la mère, qu'on brûle ensuite. Vous imaginez la résonance pour la famille ?"

Elle connaissait l’un de ses meurtriers

Reste à savoir le mobile exact du crime. "Le matin, ma femme lui avait rendu visite, a raconté Daniel, son autre fils, au Parisien. Ma mère était frêle, mais elle allait bien !" Selon ses proches, Mireille Knoll semblait connaître l’un de ses agresseurs, son voisin, depuis qu’il avait 7 ans. Dans une interview pour la radio israélienne, sa petite-fille, Noa Goldfarb, a confirmé que sa grand-mère connaissait l’un des suspects et qu’elle était "toujours contente de le voir". "Elle ne croyait pas au mal. C’est peut-être pour ça qu’elle n’est plus avec nous." Selon le fils de la victime, interrogé par le média israélien i24, l'homme aurait été vu chez elle quelques heures avant le meurtre. "À la grande surprise de notre famille et notamment de ma femme et de mon frère, le jour-même il était là, amical avec ma mère, tout en buvant du porto. Et on sait ce qu’il s’est passé ensuite."

L’homme, né en 1989, sortait de prison après avoir été condamné en 2017 pour agression sexuelle sur une fillette de 12 ans, la fille de la garde-malade de Mireille Knoll. Interrogée par RTL, cette dernière n’est pas surprise : "J'ai toujours dit que c'était une personne dangereuse parce qu'avant même qu'on arrive dans l'appartement, [les fils de Mireille Knoll] se plaignaient que des choses disparaissent, comme de la vaisselle, des verres, de l'argent", raconte-t-elle. "Cela m'a toujours fait penser qu'il pouvait être dangereux pour Mireille, mais pas au point de la tuer", poursuit-elle.

"Savta (grand-mère en hébreu, NDLR) a été poignardée à mort 11 fois par un voisin musulman qu’elle connaissait bien. Il s’est également assuré de mettre le feu à son appartement pour ne nous laisser aucun souvenir. Pas d’album photo, ni d’elle… ni de Saba (grand-père), pas de lettres… rien ! Il ne nous reste que nos larmes", a écrit sa petite fille sur Facebook.