Alors que le rapport sur l'instauration d'une taxe carbone sera remis mardi au président Nicolas Sarkozy, plusieurs voix s'élèvent déjà pour le critiquer, s'il doit déboucher sur un alourdissement de la fiscalité des ménages.
AFP - Syndicats et associations de consommateurs ont jugé jeudi "inacceptable" tout projet de taxe carbone, s'il revient à un transfert vers les ménages des impôts payés par les entreprises, comme lors du débat sur la TVA sociale.
Le mécanisme de "TVA sociale" débattu en 2007 consistait à augmenter la taxe payée sur les produits de consommation et à baisser simultanément les cotisations sociales patronales. Il a fait polémique entre les deux tours des législatives en 2007, coûtant de nombreux sièges à l'UMP selon les analystes.
Or pour la CGT, Force ouvrière, l'UFC-Que Choisir ou encore la CLCV (Consommation, logement et cadre de vie), les modalités projetées de mise en oeuvre de la taxe carbone peuvent poser le même problème. Pour tous, un alourdissement de la fiscalité des ménages est la ligne rouge à ne pas franchir.
"Depuis 2007, on sent que le gouvernement veut utiliser la taxe carbone pour réaliser son grand rêve: prendre de l'argent aux particuliers pour le donner aux entreprises. Ils ont tenté le coup avec la TVA sociale, ça n'a pas marché. L'objectif écologique de la taxe carbone nous laisse sceptiques, mais il est intéressant. Le problème, c'est que tout est parasité par le fait que le gouvernement veut utiliser cet objectif pour faire une crypto-TVA sociale", a déclaré à l'AFP François Carlier, directeur des études à l'UFC-Que Choisir.
Mercredi, son organisation, partisan du chèque vert prônée par la fondation de Nicolas Hulot, avait dénoncé dans la taxe carbone "un hold up fiscal".
Dans les faits, rien n'est encore tranché. Michel Rocard doit remettre son rapport mardi et l'ancien Premier ministre socialiste, assure que la taxe carbone doit "ne servir qu'à modifier le comportement énergétique des Français" et "pas à fournir des ressources au budget de l'Etat".
L'essence, le chauffage, l'éclairage et peut-être l'électricité coûteraient plus cher, avec à la clé une facture pouvant atteindre 300 euros par an pour plus de la moitié des foyers (pour une tonne de CO2 facturée 32 euros).
Ce mécanisme rapporterait un peu plus de 8 milliards d'euros, l'équivalent d'un point de TVA, et pourrait selon M. Rocard entrer en vigueur en 2010, année où la suppression d'une partie de la taxe professionnelle sur les entreprises a été annoncée par Nicolas Sarkozy.
La suppression de la taxe professionnelle doit être votée cet automne.
Coïncidence de calendrier ou pas, les protestations ont été vives mercredi et jeudi.
FO, "pas opposée au principe de cette taxe" carbone, souligne que "les salariés ne doivent pas payer pour les entreprises", dans un communiqué.
Pour la CLCV, "ce qui semble se dégager du rapport est inacceptable, car c'est une taxation supplémentaire des ménages, notamment classes moyennes", a dit à l'AFP sa présidente Reine-Claude Mader.
La CLCV a participé au Grenelle de l'environnement et à la concertation organisée par M. Rocard. "Nous n'avons pas d'a priori contre un verdissement de la fiscalité, mais à fiscalité constante. Un transfert de fiscalité des entreprises vers les ménages est inacceptable", a prévenu Mme Mader.
La CGT, elle aussi "favorable à une taxe carbone", "n'acceptera pas que sa mise en place accroisse les inégalités". Son association de consommateurs, l'Indecosa-CGT, a dénoncé "une nouvelle trouvaille du gouvernement pour financer la suppression de la taxe professionnelle". "On en avait déjà parlé au moment du débat sur la TVA sociale... ce n'est pas la même taxe, mais c'est toujours le même principe", a observé sa secrétaire nationale, Alicia Girardin.