
L’homme d’affaire franco-israélien, Arnaud Mimran, a affirmé avoir versé un million d'euros au Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou. Il comparaissait devant le tribunal correctionnel de Paris pour une escroquerie au marché du carbone.
La phrase bredouillée par Arnaud Mimran devant le tribunal correctionnel de Paris, jeudi 19 mai, a de quoi donner des sueurs froides au Premier ministre de l'État hébreu. Alors que l'homme d'affaires franco-israélien comparaissait dans une affaire d’escroquerie sur le marché des quotas à la taxe carbone, le prévenu a déclaré qu'il avait versé un million d'euros à Benjamin Netanyahou, ont rapporté des journalistes de Mediapart et Haaretz, présents durant le procès.
Tout est parti d’une remarque du président du tribunal correctionnel, prononcée dans le flot des audiences de ce procès fleuve – Mimran comparait aux côtés de 11 autres personnes et deux sociétés pour une arnaque à la taxe carbone d’un montant de plus d’un milliard d’euros entre 2008 et 2009.
"Je lui [Netanyahou] ai versé un million", a fini par lâcher l’homme d’affaire en hésitant sur les syllabes, raconte Michel Deléan de Mediapart. Auparavant, le magistrat avait dû insister, rappelant au prévenu que cet élément figurait dans son dossier et qu’il ne s’agissait donc pas seulement d’une rumeur dans la presse, comme l’avait suggéré l’avocat de Mimran.
Démenti de Netanyahou
Benjamin Netanyahou a immédiatement réagit, réfutant "fermement" les révélations du magnat franco-israélien sur le financement de ses activités politiques, rapporte Dov Aflon d’Haaretz. Cette accusation peut lui nuire gravement s’il est avéré que cette somme a été utilisée pour financer sa campagne, car en Israël les lois réglementant le financement des campagnes politiques sont très strictes. Ainsi, un candidat à la Knesset ne peut pas accepter un don de plus de 2 970 dollars par personne, un candidat à la tête d’un parti ne pourra recevoir, lui, plus de 11 870 dollars par donateur.
Le généreux don d’Arnaud Mimran aurait été effectué en 2001, bien avant l'arnaque au quota de taxe carbone, a toutefois précisé Mediapart qui a enquêté auprès de spécialistes du dossier. À l’époque, Benjamin Netanyahou n’était pas encore ministre.
"Il apparaît qu'Arnaud Mimran a contribué au financement de l'activité publique de M. Netanyahou pendant cette période, quand M. Netanyahou n'avait aucune fonction officielle. Cette activité comprenait conférences et tournées à l'étranger pour expliquer les positions israéliennes, et a toujours respecté les lois en vigueur en la matière", avait justifié les services du Premier ministre israélien dans un communiqué fin avril après les révélations de Médiapart.
Vacances en famille à Monaco
Le riche homme d’affaire et l’actuel Premier ministre israélien se fréquentent de longue date. Le site d’investigation avait obtenu, en mars, des photographies montrant Arnaud Mimran, attablé aux côtés de Benjamin Netanyahou, lors de vacances familiales à Monaco en 2003.
"D’après plusieurs témoignages concordants, la famille [Mimran] a aidé le parti Likoud et prêté au début des années 2000 son appartement de l’avenue Victor-Hugo [à Paris, dans le très chic 16e arrondissement] à Netanyahou", avait alors révélé le média français.
Mimran et la mafia "franco-israélienne"
Prévenu de premier plan dans l’affaire de l’escroquerie sur le marché des quotas à la taxe carbone, le financier n’intéresse pas seulement les juges du pôle national financier. Son nom revient dans plusieurs dossiers d'assassinats.
Soupçonné d’être proche de la mafia franco-israélienne que la police nomme le "milieu affairiste franco-israélien", son nom est cité, sans mise en cause par la justice, dans plusieurs affaires de meurtre dont celui de son ex-associé, Samy Souied, qui n’était alors pas en mesure de rembourser la somme estimée entre 20 et 50 millions d'euros qu’il lui devait, et du milliardaire Claude Dray, son ex-beau-père. Enfin, il pourrait avoir un lien avec le meurtre, en avril 2014, du garde du corps de Cyril Mouly, un grand joueur de poker avec qui Mimran connaît quelques démêlés.
Le procès de l’arnaque à la taxe carbone, qui s’achève le 30 mai, doit reprendre mercredi devant le tribunal correctionnel de Paris.