
Les autorités du Kenya veulent que le clip de la chanson "Same Love" ne soit pas accessible pour les internautes kenyans, mais Google Kenya a refusé. Réalisé par le groupe "Art Attack", la vidéo appelle à la tolérance envers les homosexuels.
C’est le premier clip musical pro-gay kenyan et il est, depuis plusieurs semaines, au centre d’une bataille entre les autorités du pays, qui veulent la faire disparaître de YouTube, et Google Kenya, qui refuse.
Le clip de la chanson “Same Love”, du groupe kenyan “Art Attack”, alterne images romantiques de couples du même sexe dans des situations du quotidien et passages beaucoup plus crus de corps-à-corps. Tout au long de la chanson, une voix féminine répète qu’elle “ne pourrait pas changer [d’orientation sexuelle], même si elle essayait, même si elle le voulait”. La vidéo se termine sur l’image d’un jeune homme qui, visiblement, commet un suicide.
Ce film vise clairement à dénoncer les lois kenyanes, qui punissent les relations homosexuelles entre adultes consentants de 14 ans de prison. “Same Love” est en fait une reprise adaptée aux spécificités kenyanes de la chanson éponyme du duo de hip-hop américain Macklemore et Ryan Lewis. La version originale avait été créée à l’occasion de la campagne pour la légalisation du mariage gay en Californie en 2012.
Google Kenya se dit incompétent
“Nous ne voulons pas faire l’apologie de l’homosexualité avec cette chanson, mais dire qu’il faut laisser tranquille ceux qui s’aiment”, assure dans le podcast pro-gay nigérian “No Strings” l’un des membres de “Art Attack” qui affirme, par ailleurs, être hétérosexuel. Conscients des tensions autour de la question de l’homosexualité au Kenya, les auteurs de la chanson refusent de révéler leur identité de peur de subir des représailles
Leur clip provocateur, mis en ligne début février, a eu, il est vrai, son petit effet dans ce pays où le vice-président William Ruto a déclaré, en mai 2015, qu’il “n’y a pas de place pour les homosexuels au Kenya”. Plus de 150 000 personnes ont vu “Same Love”.
Face à ce succès, l’Autorité kényane de classification des films (KFCB) a demandé, fin février, à Google Kenya de bloquer le clip pour les internautes du pays pour des "raisons morales". Cet organe public a d’ailleurs fait, à son corps défendant, la promotion de la chanson en retweetant un message annonçant la demande de suspension qui comporte un lien vers la fameuse vidéo sur YouTube.
Google, de son côté, ne semble pas prêt à s’exécuter. La branche kenyane du géant de l’Internet a pris plus de deux semaines pour répondre aux autorités qu’elle était incompétente sur ces questions et qu’il fallait contacter le siège du géant de l’Internet aux États-Unis. Nairobi affirme l’avoir fait. C’était il y a près d’une semaine et la vidéo est toujours en ligne au Kenya.