Alors que les chauffeurs de taxi ont appelé à manifester jeudi contre UberPOP, le gouvernement a promis de renforcer ses dispositions anti-fraude afin de lutter contre le service américain de transports de particuliers.
Les esprits s’échauffent chaque jour un peu plus autour de la très controversée application mobile UberPOP. Alors que dans plusieurs villes de France, des conducteurs du service de transports de particuliers ont été agressés par des chauffeurs de taxi, le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a lancé, mardi 23 juin, "un appel au calme". "Force doit rester à la loi, et rien ne justifie des actes de violence. Dans un État de droit, nul ne peut se faire justice soi-même", a-t-il indiqué dans un communiqué.
Violences des chauffeurs de taxis sur des conducteurs UberPop à Marseille - FRANCE
Dans l'après-midi, à l'Assemblée nationale, le ministre avait toutefois mené la charge contre UberPOP, rappelant que l’application se trouvait en "situation d'illégalité absolue". Depuis plusieurs mois, le groupe américain de voitures de transport avec chauffeur (VTC) Uber s'est engagé dans un bras de fer avec l'État, autour de son application mobile UberPOP, qui met en relation des passagers et des conducteurs qui sont de simples particuliers.
La loi Thévenoud, adoptée en octobre 2014, interdit en effet la mise en relation de clients non enregistrés comme chauffeurs pour des prestations de taxi, sous peine de deux ans de prison et 300 000 euros d'amende. Mais aucune interdiction définitive n'a à ce jour été prononcée par la justice et la compagnie américaine continue de proposer ce service en France.
"Les règles de la concurrence doivent être respectées"
Alors que les syndicats de taxis ont appelé à des manifestations, jeudi 25 juin, pour protester contre le non-respect de la loi Thévenoud, Bernard Cazeneuve a voulu les rassurer en affirmant que le gouvernement allait activer ses services anti-fraude pour lutter contre ce service. Le gouvernement considère "que le droit doit passer et que les règles de la concurrence doivent être respectées", a-t-il déclaré. Les usagers d'UberPOP "doivent avoir conscience qu'ils prennent eux-mêmes des risques", en se faisant conduire par des chauffeurs non professionnels, insiste-t-il dans le communiqué.
À Paris, le préfet de police Bernard Boucault et le procureur de la République François Molins, lors d'une conférence de presse commune, ont de leur côté prévenu d'une plus grande sévérité à venir envers les chauffeurs UberPOP. "Nous [allons] rehausser le niveau de la réponse pénale, notamment à l'égard des réitérants et des récidivistes, en passant à des réponses plus dures se traduisant par des déferrements au parquet et par des saisies de véhicules", a assuré François Molins.
Agressions
Cette mise au point des autorités intervient alors que le climat s'est brusquement tendu. À Lyon, un homme a été violemment frappé dans la nuit de samedi à dimanche alors qu'il aurait fait savoir à un chauffeur de taxi qui refusait de le transporter qu'il allait faire appel au service UberPOP. Ses avocats ont appelé mardi soir les témoins de la scène à se manifester.
À Nice, quelques jours plus tôt, un chauffeur UberPOP avait porté plainte, assurant avoir été agressé par des taxis dans la nuit du 15 au 16 juin. Six chauffeurs de taxi ont été placés quelques heures en garde à vue mardi dans cette affaire avant d'être remis en liberté.
"Si des actes de violence sont commis par des taxis contre des chauffeurs, la justice prendra ses responsabilités et le parquet de Paris saura être là pour engager des poursuites rapides", a assuré le procureur de Paris.
Le préfet de police a indiqué avoir engagé "une série de contrôles qui seront encore accrus", assurant avoir donné des instructions "pour constater ces violences d'où qu'elles viennent". Pour l'instant, "aucune plainte" n'a été déposée à Paris pour ce genre de faits, a-t-il déclaré.
"Contraire à la liberté d'entreprendre"
Le groupe américain Uber est visé par une enquête préliminaire ouverte en novembre 2014 par le parquet de Paris, notamment pour organisation illégale d'un "système de mise en relation de clients avec des personnes qui se livrent au transport routier" de passagers "à titre onéreux", visant l'application UberPOP.
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"Des investigations sont en cours [...] et l'enquête devrait trouver un épilogue je pense dans les prochaines semaines", a expliqué François Molins, estimant qu'il était "trop tôt" pour répondre à une question sur une éventuelle interdiction de l'application.
Le Conseil constitutionnel devra, par ailleurs, se prononcer sur la conformité de l'interdiction d'UberPOP. Mardi, la Cour de cassation a en effet décidé de transmettre aux "Sages" une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par la société américaine, qui juge la loi Thévenoud peu claire et contraire à la liberté d'entreprendre. Le Conseil constitutionnel a désormais trois mois pour statuer.
Avec AFP et Reuters