
Le procès d'un trafic présumé de bébés roms s'est ouvert, mardi à Marseille. Dix personnes sont poursuivies, les unes pour avoir proposé des nourrissons à vendre pour quelques milliers d'euros, les autres, stériles, pour avoir accepté ces offres.
C'est "un dossier de commerce d'êtres humains", a résumé le président du tribunal Fabrice Castoldi, mardi 7 avril, à l'ouverture du procès à Marseille d'un trafic présumé de bébés roms. "Un puzzle de 2 000 pièces construit autour de quatre naissances", qui ont été marchandées, selon l'accusation, moyennant des sommes entre 5 000 et 10 000 euros par enfant. Dix personnes sont poursuivies dans cette affaire.
Parmi elles, la moitié est accusée d'avoir proposé des nourrissons à vendre. L'autre, constituée de couples stériles, aurait accepté ces offres.
Une fois l'accord passé entre les différentes parties, les acheteurs étaient chargés d'accueillir jusqu'à l'accouchement la mère biologique de l'enfant, acheminée depuis la Roumanie. Les nouveaux parents devaient ensuite déclarer l'enfant auprès des autorités, selon l'accusation qui évoque un réseau "particulièrement bien organisé".
Huit mille euros et une BMW contre son fils
Sur les dix prévenus, neuf personnes se sont présentées devant le tribunal mardi : cinq acheteurs issus de la communauté des gens du voyage, et quatre Roumains, tenus pour les organisateurs du trafic par l'accusation. Ces quatre hommes qui comparaissent détenus sont Ilie Ionita, 35 ans, et les compagnons de ses trois sœurs, Valeriu Rosu, 42 ans, Florian Stan, 33 ans, et Florin Coman, 25 ans. Poursuivis pour traite d'être humain, ils encourent 10 ans d'emprisonnement.
À la barre, Valeriu Rosu a nié avoir touché 8 000 euros – ou 9 000 euros selon les dépositions – ainsi qu’une BMW de la part d’un couple (Mike et Carmen Gorgan) en échange de son fils qui venait de naître. "Il n'était pas question de percevoir de l'argent, j'ai pris ça comme une aide pour les funérailles de l'oncle de ma compagne", a-t-il expliqué de manière confuse.
Le quadragénaire est également accusé par une femme d'avoir "démarché" de potentiels acheteurs en faisant des tours dans les caravanes des campements de gens du voyage, avec Ilie Ionita. "Il me serait impossible de faire ça, Dieu m'en est témoin", a-t-il lancé. Il va même jusqu'à inverser les rôles et suggérer que ce sont en réalité Mike et Carmen Gorgan - qui ont "acheté" son fils né à Marseille en juillet 2013 - qui ont tout organisé.
Prêts à tout pour avoir un enfant
Les deux concubins, eux aussi poursuivis mais qui comparaissent libres, ont pour leur part reconnu que les détails financiers de l'arrangement avaient bien été négociés avant la naissance du fils de Valeriu et Daniela Ionita, une des sœurs d'Ilie Ionita. Selon Carmen, Ilie Ionita leur avait même demandé s'ils connaissaient d'autres couples qui pourraient être intéressés.
Stériles, ayant déjà tenté quatre fécondations in vitro, ils apparaissent prêts à tout pour avoir un enfant. L’enfant acheté a été placé après l’interpellation du couple par la police de Marseille, alertée par une dénonciation anonyme.
Un cas similaire est survenu en Corse. Selon l'accusation, un petit garçon né en mai 2013 y a été vendu par une autre des sœurs d'Ilie Ionita, Fana Moise, laquelle ne s’est pas présentée au procès, et son compagnon, Florian Coman, à un autre couple de gens du voyage, Marius Demestre et Kelly Sara, eux aussi poursuivis.
Deux autres cas de vente, qui n'ont pas abouti, ont également été mis au jour par les enquêteurs, impliquant dans un cas l'enfant d'une troisième sœur d'Ilie Ionita, et dans l'autre, l'enfant d'un autre couple.
Avec AFP