David Cameron a obtenu vendredi un large soutien des parlementaires britanniques en vue d’une participation du Royaume-Uni aux frappes aériennes de la coalition contre l'organisation de l'État islamique en Irak.
Convoqués en session extraordinaire vendredi 26 septembre, les parlementaires britanniques ont massivement autorisé David Cameron (524 voix pour, 43 contre) à engager les forces du Royaume-Uni dans la coalition contre l'organisation de l’État islamique (EI). "Cela va être une mission qui ne va pas prendre des mois mais des années mais je pense que nous devons nous préparer pour cet engagement", avait notamment déclaré David Cameron à l’ouverture des débats.
Les chasseurs bombardiers britanniques, opérant depuis une base de la Royal Air Force (RAF) à Chypre, pourraient passer à l'action dès ce vendredi soir. Jusqu’ici l'implication britannique se limitait à la livraison d'armes aux forces kurdes.
Alors que le spectre de la guerre en Irak de 2003 hante la population et les députés britanniques, le Premier ministre avait appelé le parlement à dépasser ses craintes. Ce dernier ne veut pas commettre la même erreur qu'en 2003, lorsqu'il avait approuvé l'engagement britannique dans la guerre en Irak auprès de Washington, au motif que Saddam Hussein disposait d'armes de destruction massive. Un souvenir douloureux largement entretenu par les non-interventionnistes. Les craintes d'un enlisement de l’armée comme en Afghanistan, et les pertes enregistrées lors de la campagne irakienne de 2003 à 2011 sont toujours présentes.
"Nous devons apprendre des leçons du passé. Et notamment de ce qu'il s'est passé en Irak il y a une décennie. Il faut une préparation minutieuse ; il ne faut pas se précipiter dans un conflit sans avoir un projet clair. Mais il ne faut pas être pétrifié par l’angoisse au point de ne pas agir du tout ", avait déclaré le Premier ministre britannique, le 24 septembre, devant l'Assemblée générale de l'ONU.
Éviter un nouveau camouflet
En août 2013, les députés britanniques avaient rejeté leur projet de frappes contre le régime syrien, accusé d'avoir eu recours à des armes chimiques contre des civils. Un an après ce camouflet retentissant, David Cameron a, cette fois, obtenu un soutien du Parlement. Le leader du Labour Ed Miliband avait récemment déclaré qu'il était "ouvert à la possibilité" de bombardements britanniques contre les jihadistes de l’État islamique en Irak. "Je soutiens cette motion", et ce, "parce que nous répondons à une demande de l'État démocratique irakien et que c'est reconnu dans la charte des Nations unies", a déclaré devant les députés le chef de l'opposition travailliste, vendredi 26 septembre.
Pour parvenir à ses fins, le chef du gouvernement britannique, qui a attendu la fin du référendum sur l’Écosse pour se pencher sur la question de l’EI, avait pesé chaque mot du texte qui a été soumis au vote. Ainsi, les parlementaires doivent autoriser "l'usage de frappes aériennes" en Irak, dans le cadre d'un soutien requis par le gouvernement irakien, et Londres "ne déploiera aucun soldat britannique dans les zones de combat" et ne procédera à aucun raid aérien sur le territoire syrien. Concernant ce dernier point, David Cameron n’a pas écarté une telle possibilité de procéder, mais il a affirmé que pour cela, il faudrait un vote séparé du Parlement.
"Cameron s’est montré très prudent, en s’assurant, avant même qu’il ne convoque le parlement en session extraordinaire, un large soutien des parlementaires, car il ne veut pas revivre le camouflet de l’année dernière", explique Gauthier Rybinski, spécialiste des questions internationales à France 24.
Une opinion publique majoritairement favorable
Du point de vue de l’opinion publique, malgré quelques manifestations anti-guerre, l'intervention en Irak est majoritairement soutenue au Royaume-Uni. "Il existe dans le pays un large consensus en faveur de la participation de la Grande-Bretagne à la coalition contre l’EI, et pas seulement au sein de la classe politique", confirme Afzal Ashraf, analyste spécialisé dans les questions de défense et de sécurité au Royal United Services Institute (RUSI). D’autant plus que deux otages britanniques, Alan Henning et John Cantlie sont encore aux mains du mouvement de l'État islamique et sont menacés d’être exécutés. Bethany, la fille de l'otage britannique récemment assassiné David Haines, probablement par l’un de ses compatriotes, s'est exprimée publiquement pour soutenir le projet de frappes du gouvernement.
"L'EI doit être éradiqué, ils ne peuvent pas continuer comme ça. Ils ne peuvent pas continuer de faire ce qu'ils font aux gens et s'en tirer. (...) Et si il faut des frappes aériennes, des hommes sur le terrain ou n'importe quoi d'autre, alors il faut le faire", a déclaré Bethany Haines, âgée de 17 ans. Toutefois, la famille d'Alan Henning, menacé d’être le prochain à subir le même sort, a appelé au contraire à la retenue.
"En rejoignant la coalition, le gouvernement britannique affiche sa volonté d’y jouer un rôle et de peser sur les événements afin de ne pas rester en marge d’une lutte qui fait l’unanimité dans le monde", conclut Afzal Ashraf.
Avec AFP