Des djihadistes de l'EIIL se sont emparés dimanche de la ville irakienne de Sinjar, jetant sur les routes jusqu'à 200 000 personnes, selon l'ONU. Il s’agit du deuxième revers en deux jours pour les forces kurdes.
Des djihadistes de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) se sont emparés dimanche 3 août de Sinjar, dans le nord de l’Irak, jusqu’alors sous contrôle kurde. La prise de cette ville située à 50 km de la frontière syrienne constitue une nouvelle victoire pour les djihadistes, qui ont proclamé fin juin un "califat" à cheval sur l'Irak et la Syrie, après s'être emparés de plusieurs territoires.
Nouveau revers pour les Kurdes
"Les peshmerga (combattants kurdes) se sont retirés de Sinjar, l'EIIL est entré dans la ville", a expliqué à l'AFP Kheir Sinjari, un responsable de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK). "Ils ont hissé leur drapeau sur les bâtiments gouvernementaux". "Les peshmerga se sont repliés dans les zones montagneuses et reçoivent des renforts", a cependant précisé une source haut-placée au sein des forces kurdes. L'EIIL a pour sa part publié sur Internet des photos de ses membres patrouillant dans la rue principale de Sinjar.
La prise de Sinjar intervient au lendemain de celle de Zoumar, une autre ville proche de Mossoul, d'où l'EIIL a chassé les forces kurdes, au prix de combats meurtriers.
Zoumar comme Sinjar font partie des zones prises par les peshmerga à la faveur du retrait de l'armée irakienne, complètement dépassée au début de l'offensive des insurgés sunnites en juin.
Une "tragédie humanitaire" en cours, selon l’ONU
Située entre la frontière syrienne et Mossoul, Sinjar comptait 310 000 habitants, mais accueille aussi des dizaines de milliers de réfugiés ayant fui devant l'avancée des insurgés sunnites ces dernières semaines dans la région. Selon un responsable de l’UPK, les combattants de l'EIIL ont détruit peu après leur arrivée dans la ville le sanctuaire de Sayeda Zeinab, fille de l'imam Ali et figure vénérée de l'islam chiite.
"Des milliers de personnes ont déjà fui (Sinjar), certaines en direction des montagnes avoisinantes, qui sont toujours sous contrôle kurde, et également en direction de Dohouk", dans la région autonome du Kurdistan irakien, a indiqué un autre responsable de l'UPK.
"Une tragédie humanitaire est en train de se dérouler à Sinjar", a déclaré l'émissaire de l'ONU en Irak, Nikolaï Mladenov. Brendan McDonald, un responsable du bureau des Nations unies pour les affaires humanitaires, a pour sa part évoqué des informations signalant jusqu'à 200 000 personnes déplacées. "Il y a un besoin immédiat en eau, en vivres, en abris et en services médicaux", a-t-il insisté.
Les forces kurdes ont des difficultés financières
Considérées comme les plus efficaces et les mieux organisées du pays, les forces kurdes sont toutefois sous pression en raison de difficultés financières et du poids que représente la sécurisation d'un territoire élargi de 40 %. La région autonome ne touche plus sa part des recettes pétrolières nationales et peine à écouler sa production d'hydrocarbures. En s’emparant de Zoumar et Sinjar, les djihadistes ont également pris le contrôle de deux champs de pétrole, Ain Zalah et Batma, ayant une production totale de 20 000 barils par jour, ainsi que d'une petite centrale électrique.
Selon un haut responsable, une délégation kurde est actuellement aux États-Unis pour tenter d'obtenir un soutien militaire, ce qui devrait nécessiter en théorie l'accord de Bagdad, où les institutions sont pour l'instant quasi-paralysées.
Avec AFP