La police française a arrêté mardi en Corrèze un néo-nazi norvégien et son épouse. Selon les autorités, Varg Vikernes, un chanteur de black metal, déjà condamné pour meurtre, était susceptible de préparer un acte terroriste d'envergure.
Les policiers français sont intervenus à l’aube de ce mardi 16 juillet à Salon-la-Tour, un village de Corrèze, dans le centre de la France. Ils ont arrêté à leur domicile Kistrian Vikernes, dit Varg, un Norvégien âgé de 40 ans, et son épouse Marie Cachet.
Selon le ministère de l’Intérieur, le couple "proche de la mouvance néo-nazie" était susceptible de "préparer un acte terroriste d’envergure" et constituait "une menace potentielle pour la société comme l’atteste la violence de ses propos interceptés notamment sur le Web".
Interrogé dans les couloirs de l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a précisé que, pour l’heure, il n’y avait pas de "cible ni de projet identifié ", mais que face au terrorisme, il était nécessaire "d’agir avant et non pas après". D’après lui, le couple "présentait un profil particulièrement dangereux pouvant porter atteinte aux intérêts fondamentaux du pays".
Varg Vikernes, déjà condamné pour meurtre dans son pays, faisait depuis des années l’objet d’une surveillance, mais les autorités ont décidé de l’arrêter après l’acquisition récente par sa femme de "quatre armes d’épaule". Lors de leur perquisition, les policiers ont saisi cinq armes dont quatre carabines 22 long rifle dans la maison où le couple s’était installé il y a un an avec ses trois enfants.
Pour Yves Bonnet, ancien directeur du renseignement français, cette arrestation est une bonne mesure : "C’est une interpellation de précaution. C’est une anticipation sur une action qui paraissait possible sinon probable. C’est toujours un moment délicat car on arrête quelqu’un qui n’a encore rien fait, explique-t-il sur l’antenne de FRANCE 24. On ne peut pas se permettre d’attendre qu’il passe à l’action pour faire ce qu’on appelle un flagrant délit, c’est beaucoup trop dangereux."
Des liens avec Anders Behring Breivik ?
Connu pour ses sympathies pour la droite la plus extrême, le Norvégien avait attiré tout spécialement l’attention des enquêteurs après être apparu sur la liste des 530 personnes à avoir reçu le manifeste d’Anders Behring Breivik, l’auteur de la tuerie d’Utoya en juillet 2011.
Malgré ce lien entre les deux hommes, Varg Vikernes n’a pas hésité à se moquer de son compatriote sur son blog le qualifiant de "sioniste" et lui souhaitant de se suicider : "Tu as tué plus de Norvégiens que ce qu'a fait la population musulmane en Norvège ces 40 dernières années et tu prétends être un nationaliste norvégien et un combattant patriote (aux côtés de tes maîtres juifs) contre l'islam, pour nous protéger contre leurs crimes ? Je suis désolé de te dire cela mais tu fais une grosse erreur."
Sur son site aux propos violents, racistes et antisémites, il prend également à partie la population française à laquelle il demande de voter pour le Front national : "J'habite en Norvège, le dernier État soviétique de l'Europe, et je n'ai aucun parti acceptable pour lequel voter, tandis que vous avez cette possibilité. Vous pouvez voter FN et voir votre nation retourner à sa grandeur", clame-t-il dans un texte intitulé "Chère France".
Un chanteur de black metal meurtrier
Varg Vikernes n'est pas un militant néonazi lambda. Connu aussi sous le nom Count Grishnackh, il est une figure du black metal norvégien. Au début des années 1990, il s’est fait connaître au sein du groupe Burzum. Mais en 1993, à l’âge de 21 ans, le chanteur est arrêté après avoir tué de plus de 20 coups de couteau, un de ses anciens amis, Øystein Aarseth, dit Euronymous et membre du groupe Mayhem. À l’époque, alors que les médias avaient mis en avant un conflit d’argent ou une lutte de pouvoir au sein de ce mouvement musical, Varg Vikernes avait pour sa part plaidé la légitime défense. "Le gars que j’ai tué voulait me tuer. Je l’ai donc arrêté avant", avait-il raconté dans une interview.
Se revendiquant de la religion Ásatrú, une manifestation du néo-paganisme germanique, le musicien, farouchement anti-chrétien, a aussi été reconnu coupable lors de son procès de l’incendie de trois églises et du vol de 150 kilos d’explosifs. C’est avec un sourire que le jeune homme avait réagi à l’énoncé du verdict, le condamnant à 21 ans de prison.
Après une tentative d’évasion en 2003, Varg Vikernes bénéficie finalement d’une libération conditionnelle en 2009. C’est à cette époque qu’il décide de quitter son pays et de s’installer dans l’Hexagone, après son mariage avec Marie Cachet, une Française. Kristian Vikernes et son épouse sont actuellement en garde à vue. Leurs enfants, qui n’étaient pas scolarisés, auraient été pris en charge par la mère de la jeune femme.