
Jamais, depuis quarante ans, les Antilles n'avaient vécu une telle agitation. Après des semaines de paralysie, les tensions semblent enfin s'apaiser. Mais la crise outre-mer a fait resurgir des malaises autant économiques que sociaux.
Retrouvez ici les Carnets de Route de nos envoyés spéciaux FRANCE 24 aux Antilles
Pendant de longues semaines, la Guadeloupe a été paralysée par un conflit social historique. Il y avait quarante ans que les Antilles n’avaient pas vécu un tel mouvement, qui tient d'ailleurs plus de la révolte. Voitures calcinées, routes barrées, stores baissés… Au plus fort de la crise, 20 000 personnes ont envahi les rues de Pointe-à-Pitre.
Peu après, le mouvement s’est étendu sur l’île voisine de la Martinique, emportée dans une vague de violences.
Les raisons de cette colère : le coût de la vie, bien plus élevé qu’en métropole, un chômage endémique et une économie verrouillée.
Un salarié sur cinq touche le Smic - le même qu’en France -, alors que les prix sont très nettement supérieurs à ceux pratiqués en métropole. En moyenne, en 2008, les produits de base ont augmenté de 18 % en Guadeloupe et 8 % en Martinique. Le Smic, lui, n’a progressé que de 3 %.
La grande distribution pointe du doigt les coûts de transport, les marchandises arrivant pour la plupart de métropole par bateau et par avion. Mais les économistes contestent cette analyse et affirment que les transports n’augmentent que de 10 % le prix des produits importés.
Bien au-delà des revendications économiques, cette révolte antillaise trouve aussi son origine dans des fractures anciennes liées à l’histoire de l’esclavage.
En Martinique, les tensions raciales sont vives. Les "békés" - les Blancs descendants des anciens colons -, ont régné sur l’île pendant 200 ans. Leur pouvoir s’est considérablement réduit tout au long du XXe siècle mais, aujourd’hui encore, ils détiennent environ 20 % des secteurs clés de l’économie de la Martinique, alors qu’ils ne représentent que 1 % de la population totale.
"Ici, on ne vit pas en apartheid mais en aparté. Il n’y a pas assez de mélange", constate, révoltée, Marie-Claire Dormoy, pourtant "Béké".
Cette crise devrait permettre de remettre à plat tout un système. Dans cette perspective, Nicolas Sarkozy a appelé à des états généraux dans les principaux secteurs, d’ici le mois d’avril.
Une résolution qui laisse les collectifs sceptiques.