
Depuis samedi, le journaliste Roméo Langlois, correspondant en Colombie de FRANCE 24 et du quotidien "Le Figaro", est porté disparu après des combats entre l’armée et la rébellion des Farc. Selon Bogota, il est détenu par la guérilla marxiste.
Le correspondant en Colombie de FRANCE 24 et du quotidien Le Figaro, Roméo Langlois, disparu lors de combats, samedi dernier, entre l’armée et la rébellion marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), est très vraisemblablement retenu en otage par la guérilla.
Des "indices très clairs" permettent d’affirmer "que le journaliste français est détenu par les Farc", a déclaré lundi le président colombien Juan Manuel Santos, sans toutefois donner plus d’éléments.
Une hypothèse également privilégiée par les autorités françaises, comme l'indique un communiqué officiel publié lundi : "Même s'il n' y a pas de revendication formelle de son enlèvement, nous considérons, avec les autorités colombiennes, que notre compatriote est très probablement aux mains des Farc. Nous les tenons pour responsables de la situation de M. Langlois. Elles se sont engagées publiquement à renoncer aux enlèvements. Nous leur demandons instamment de respecter cet engagement et nous les appelons à libérer immédiatement M. Langlois", peut-on lire dans ce document. "Comme le ministre d'État l'a déclaré hier, nous sommes pleinement mobilisés pour obtenir la libération de notre compatriote. Nous sommes en contact étroit avec les autorités colombiennes, la famille de M. Langlois ainsi qu'avec la rédaction de FRANCE 24 pour laquelle il travaille", poursuit le Quai d'Orsay.
Blessé au bras gauche
Lors de sa disparition, Roméo Langlois, 35 ans, réalisait un reportage sur le narcotrafic dans la région de Caqueta (Sud) pour FRANCE 24. Dimanche, le ministre colombien de la Défense, Juan Carlos Pinzon, avait déjà donné quelques détails sur le déroulement de l’embuscade : "D'après ce que m'ont raconté les personnes qui étaient avec lui jusqu'au dernier moment [...], il a été touché par une balle au bras gauche" et, dans la "confusion" qui régnait alors sur le terrain, "il a certainement pris la décision d'enlever sa veste et son casque" pour signaler à la guérilla qu'il était un civil.
La patrouille des forces aéronavales colombiennes qu’accompagnait Roméo Langlois aurait été attaquée dans la matinée de samedi par les Farc. Les affrontements auraient provoqué la mort d’au moins quatre militaires.
Des six personnes portées disparues dans les heures qui ont suivi l’affrontement, seul Roméo Langlois l’est toujours. Les cinq militaires qui ont été capturés en même temps que le journaliste ont été relâchés dans la journée de dimanche.
L’opération, au cours de laquelle quatre autres soldats ont été blessés, a tout de même permis la destruction de cinq laboratoires de fabrication de cocaïne, affirme un porte-parole du ministère colombien de la Défense.
Une opération maintes fois repoussée
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Installé depuis dix ans en Amérique du Sud, Roméo Langlois a réalisé de nombreux reportages en Colombie. "Nous savons que c’est une région dangereuse. Nous sommes bien sûr inquiets, mais nous faisons confiance à Roméo qui connaît bien le terrain et qui a beaucoup d’expérience. Nous espérons donc qu’il est sain et sauf", a déclaré Nahida Nakad, directrice des rédactions de l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF).
Simone Bruno est également correspondant de FRANCE 24 en Colombie. Lui aussi devait faire partie de la mission de l'armée colombienne, reportée à plusieurs reprises en raison de conditions climatiques difficiles. "Nous étions dans un camp militaire en attendant l’opération qui devait commencer mardi, puis elle a été repoussée à mercredi, jeudi, vendredi... Du coup, je suis parti mais Roméo est resté, explique Simone Bruno. La dernière fois que je lui ai parlé, c’était vendredi soir. Il m’a dit que l’opération allait démarrer à 4 heures du matin, dans la nuit de vendredi à samedi. Il devait m’envoyer des nouvelles dès son retour."
Lorsque les premières informations sur les heurts ont filtré, samedi, Simone Bruno a tenté, en vain, de joindre son collègue : “Au début, les informations étaient très confuses, explique-t-il. Puis, le commandant [de la région militaire] nous a dit que Roméo était porté disparu et qu’ils étaient à sa recherche".
Rançons et narcotrafic
Créées en 1964, les Farc sont l’un des derniers groupes marxistes révolutionnaires du continent sud-américain. Le groupuscule mène depuis des dizaines d’années des campagnes d’enlèvements, dont les rançons, parallèlement au narcotrafic, sont devenues leurs principales sources de revenus. Ingrid Betancourt, femme politique franco-colombienne, a été retenue pendant plus de six ans par la guérilla avant d’être relâchée en 2008.
Ces derniers mois, les forces de sécurité colombiennes ont néanmoins remporté quelques victoires contre la rébellion, principalement dans le nord du pays. Affaiblies par la campagne menée par l’armée colombienne avec le soutien des États-Unis, les Farc ont libéré quelques otages et annoncé qu’elles cesseraient de tirer bénéfice des enlèvements.
Si le président colombien Juan Manuel Santos a vu dans ces initiatives un "pas dans la bonne direction", il a toutefois émis des doutes sur la volonté des Farc d’abandonner les enlèvements comme sources de revenus ou de négocier des accords de paix pérennes. Une analyse confirmée par les experts qui s’accordent pour dire que les négociations de paix, même officieuses, ne donneront probablement aucun résultat avant les élections de 2014.