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Le discours sécuritaire s'invite dans la campagne présidentielle

Suspendue à la suite de la tuerie devant une école juive de Toulouse, la campagne présidentielle a repris ses droits. Le thème de la sécurité y fait un retour en force après les annonces du président pour lutter contre le terrorisme.

"Fermeté". Nicolas Sarkozy a prononcé le mot, jeudi 22 mars, après l’opération qui s’est conclue par la mort de Mohamed Merah, l'auteur présumé des assassinats de sept personnes - quatre juifs, dont trois enfants, et trois miliaires - à Montauban et à Toulouse. Ce dernier avait revendiqué appartenir au groupe terroriste Al-Qaïda, une référence qui a fait ressurgir l’un des thèmes majeurs de la droite en période électorale : la sécurité.

Lors d’un meeting à Strasbourg, Nicolas Sarkozy s’est félicité que l'assassin, qui "a voulu 'mettre la France à genoux' en semant la haine et la terreur […], [ait] été mis hors d'état de nuire". Un assassin que celui-ci a qualifié de "monstre" et de "fanatique". Le président-candidat a aussi annoncé des mesures pour réprimer "l’apologie du terrorisme" ou "l’appel à la haine et à la violence". Il prévoit notamment de punir pénalement toute personne qui consultera des sites Internet liés au terrorisme.

Attaqué sur le thème sécuritaire par la droite, son adversaire socialiste à la présidentielle, François Hollande, a dit vouloir faire de la République la meilleure arme contre le terrorisme. "La République ne laissera aucun terroriste en paix, la République poursuivra tout ce qui menace la sécurité de nos citoyens", a-t-il déclaré lors d’un meeting à Aurillac, annonçant des moyens renforcés pour la justice et la création de zones de sécurité prioritaires.

La sécurité, fer de lance de la droite

"Nous nous retrouvons dans une situation où les enjeux de sécurité vont s’imposer et où les questions de terrorisme et de garantie de sécurité vont prendre de l’importance", estime pour sa part Olivier Rouquan, politologue et enseignant-chercheur en science politique, contacté par FRANCE 24. 

Du pain béni pour l’extrême droite ? "Cela fait des mois que je souligne le problème de l’avancée du fondamentalisme (…). Il en va de la sécurité de tous les Français," a déclaré Marine Le Pen mercredi sur FRANCE 24, dénonçant le laxisme du reste de la classe politique. La candidate du Front national, jusqu’ici plutôt silencieuse depuis la tuerie du 19 mars, avait plus tôt dans la journée mis en avant l’idée d'un référendum sur le rétablissement de la peine de mort et la "perpétuité réelle." Le candidat du Modem François Bayrou a, pour sa part, accusé l’extrême droite de chercher à "surfer sur la situation."

Si les thèmes sécuritaires sont susceptibles de profiter à Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy ne devrait pas non plus être en reste.

En 2007, l’UMP avait fait de la sécurité son fer de lance. Une politique considérée comme flirtant avec l’électorat frontiste. Récemment baptisé "Nicolas Le Pen" par le Wall Street Journal, le président candidat traîne cette réputation même au-delà des frontières françaises.

Brandi du côté droit de l’échiquier politique, le thème de la sécurité peine en revanche à trouver un écho fort à gauche, selon Olivier Rouquan. "Dès lors que la sécurité surgit, il est clair que la gauche n’est pas favorisée. Le candidat socialiste possède une marge beaucoup plus serrée sur ces enjeux par rapport à ses deux rivaux de droite."

"De plus, en période électorale, lorsque la classe politique est confrontée à un problème sécuritaire, le président sortant est généralement avantagé", analyse Olivier Rouquan, au moment où le candidat du Parti socialiste et Nicolas Sarkozy sont pour l’instant au coude à coude dans les sondages.

Un débat plus axé sur les sujets économiques

Un revirement brutal de la campagne présidentielle reste néanmoins exclu, selon Olivier Rouquan, qui admet cependant des bouleversements à prévoir.

Questionné sur les similarités avec le contexte politique de 2002, fortement marqué par une campagne axée sur l’insécurité, et qui a abouti à la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle – il tempère : "La campagne à laquelle nous assistons est sensiblement différente de celle de 2002. Aujourd’hui, les enjeux sociaux, notamment la lutte contre la crise de la dette, sont bien ancrés dans l’esprit des électeurs, et ce depuis de longs mois. Le thème sécuritaire n’est pas aussi présent qu’il pouvait l’être en 2002." Il y a dix ans, la campagne présidentielle s’inscrivait dans un après 11-Septembre, une période au cours de laquelle la lutte anti-terroriste était un sujet crucial.

"Même si Sarkozy ou Le Pen sont politiquement avantagés dans un premier temps par cette affaire, rien ne dit que cela durera. Et de conclure, "Quoi qu’il en soit, cet évènement ne va pas effacer d’un trait toutes les préoccupations des Français."