L'avocat de la femme de chambre qui accuse Dominique Strauss-Kahn d'agressions sexuelles a indiqué que sa cliente allait engager des poursuites au civil pour réclamer des dommages et intérêts. Même en cas de non-lieu au pénal.
AFP - La femme de chambre qui accuse Dominique Strauss-Kahn de crimes sexuels poursuit son offensive médiatique avec une apparition publique jeudi pour remercier, dans le cadre d'une organisation communautaire africaine, ceux qui "l'ont soutenue lors de cette terrible épreuve".
L'intervention publique de Nafissatou Diallo, l'immigrée guinéenne de 32 ans sortie de
l'ombre dimanche dernier et longuement entendue mercredi au bureau du procureur de New York, était prévue à midi (16H00 GMT) dans un centre communautaire chrétien situé à Canarsie, un quartier pauvre du sud de Brooklyn (sud-est de New York).
La jeune femme, musulmane, devait être accompagnée de son avocat Kenneth Thompson, du pasteur A.R. Bernard, directeur de ce centre, et de plusieurs dirigeants d'organisations de défense des femmes, selon le communiqué publié la veille.
Sa déclaration ne devait pas être suivie d'une conférence de presse, ont précisé les organisateurs. Mais en milieu de matinée, les journalistes commençaient déjà à affluer à Brooklyn et à installer camions et antennes satellitaires dans le parking de cet immeuble bas, qui héberge notamment des lieux de prière, une garderie d'enfants, une bibliothèque, une école.
Mercredi, Nafissatou Diallo a été entendue pendant huit heures par le procureur, notamment sur une conversation téléphonique qu'elle a eue avec un détenu au lendemain des faits présumés.
Début juillet, le New York Times avait révélé que Nafissatou Diallo avait téléphoné, le lendemain de l'agression présumée, à un ami emprisonné en Arizona pour une affaire de drogue. Elle aurait affirmé en parlant de DSK: "Ce type a beaucoup d'argent, je sais ce que je fais".
Cette conversation est l'un des éléments clés qui a fait vaciller l'accusation, entraîné la libération sur parole de DSK, et jeté une ombre sur les motivations réelles de cette femme qui affirme avoir été agressée sexuellement le 14 mai dans une suite de l'hôtel Sofitel de New York.
Mercredi soir, à la sortie du bureau du procureur, Me Thompson a établi sa version des faits.
"Certaines choses ont été mélangées dans cette citation qui a été donnée au New York Times", a-t-il déclaré. "Nous avons écouté cet enregistrement et il montre que la victime n'a jamais prononcé ces mots".
"Elle a dit +quelqu'un a essayé de me violer et c'est quelqu'un qui a du pouvoir, un homme important+", a assuré l'avocat.
Dans une interview donnée à la télévision américaine ABC et diffusée lundi et mardi, Mme Diallo a affirmé n'avoir jamais prononcé les mots qui lui sont prêtés par le quotidien. Elle dit avoir déclaré "je sais ce que je fais" au moment où elle évoquait, au téléphone, le fait de recourir à un avocat.
Me Thompson a par ailleurs indiqué que sa cliente avait "le droit d'engager sa propre action en justice" au civil pour demander à l'ancien ministre français des dommages et intérêts.
Si Dominique Strauss-Kahn a été libéré sur parole le 1er juillet, il est toujours sous le coup de sept chefs d'accusation aux Etats-Unis, notamment tentative de viol, agression sexuelle et séquestration, qui peuvent lui valoir de nombreuses années de prison. Il est privé de son passeport et ne peut quitter le territoire américain.
Dimanche, après dix semaines de silence et d'anonymat, la jeune femme avait rompu le silence en offrant son visage et son témoignage à plusieurs médias américains.
Dans l'entretien intégralement diffusé mardi sur ABC, elle a raconté avec force détails les agressions dont elle assure avoir été victime.
"Je suis entrée dans la suite en disant trois fois +Hello, femme de ménage+, et tout à coup j'ai vu un homme nu, j'ai dit +Oh mon Dieu je suis si désolée+, mais il s'est jeté sur moi, a fermé la porte et m'a poussée", raconte-t-elle en anglais à la journaliste d'ABC.
Dans l'interview, Nafissatou Diallo entre ensuite dans des détails très crus, racontant comment elle a été forcée à pratiquer une fellation à l'ancien ministre français. "Il tenait ma tête, j'étais par terre je n'arrivais pas à me relever", dit-elle. Elle dit avoir ensuite craché sur la moquette.
DSK avait été interpellé ce jour-là, samedi 14 mai en milieu d'après-midi, à bord d'un avion sur le point de décoller pour Paris.
Le procureur a demandé en début de semaine un nouveau report de l'audience qui était prévue le 1er août prochain --après avoir été repoussée du 18 juillet au 1er août-- pour poursuivre l'enquête. L'audience est maintenant prévue le 23 août prochain.