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Dans une interview au quotidien "Le Monde", un haut responsable du constructeur automobile français dénonce une opération d'espionnage servant "des intérêts étrangers". Sans citer de pays. La piste chinoise reste toutefois privilégiée.

Reuters - Renault est victime d’une filière internationale organisée dans l’affaire d’espionnage industriel présumé dans laquelle trois cadres ont été mis à pied, déclare son directeur général délégué, Patrick Pélata.

"Il s’agit en l’espèce d’un travail de professionnels", déclare Patrick Pélata dans un entretien au journal Le Monde à paraître samedi. "Renault est victime d’une filière organisée internationale."

"Cette affaire d’espionnage présumé ne change en rien le programme de développement du véhicule électrique qui est au coeur de la vision stratégique voulue par Carlos Ghosn (PDG de Renault)", ajoute-t-il.

Des informations sur l’architecture du véhicule ainsi que sur les coûts et le modèle économique du programme de voiture électrique ont pu fuiter mais "aucune pépite technologique" n’a pu filtrer en dehors de l’entreprise, déclare Patrick Pélata au Monde daté de dimanche-lundi.

"Qu’il s’agisse notamment de la chimie des électrodes, de l’architecture des batteries, de l’assemblage des différents éléments, du chargeur ou du moteur lui-même, nous sommes sereins", dit-il.

Renault a décidé d’investir quatre milliards d’euros avec son partenaire Nissan sur le véhicule électrique, qui constitue une priorité pour le constructeur français.

La technologie de la voiture électrique, qui permet de ramener à zéro les émissions de CO2, est désormais jugée incontournable par l’ensemble des constructeurs mondiaux et est soutenue par les pouvoirs publics à travers le monde.

Un dépôt de plainte "inévitable"

Les trois cadres passeront "dans quelque temps" un entretien préalable à un éventuel licenciement, "dans le plus strict respect du code du travail", dit Patrick Pélata.

"Sur le plan juridique, nous sommes en train d’envisager toutes les options qui conduiront inévitablement à un dépôt de plainte", ajoute-t-il.

La Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) enquête sur ce dossier et une piste chinoise est suivie, a-t-on appris vendredi de source proche du gouvernement.

La piste chinoise n’est pas évoquée par Patrick Pélata dans son entretien au Monde et rien ne permet pour l’instant de la privilégier, a déclaré samedi Eric Besson.

"La piste chinoise est privilégiée, peut-être, mais moi, je ne suis pas qualifié pour le dire", a dit le ministre de l’Industrie sur Europe 1. "A stade, je ne peux pas l’affirmer. Seule une enquête contradictoire pourra le démontrer."

Eric Besson, qui a appelé à respecter la présomption d’innocence, a dit que la DCRI n’avait pas encore été saisie dans un cadre judiciaire mais devrait l’être dès que Renault portera plainte, vraisemblablement lundi.

"Renault va porter plainte et La DCRI sera très vraisemblablement mobilisée par la justice", a dit le ministre. "A ce moment-là, nous en saurons beaucoup plus sur ce que seraient les commanditaires, les destinataires, etc"

Plusieurs milliers d’incidents

Le délégué interministériel à l’intelligence économique, Olivier Buquen, souligne l’ampleur du problème de l’espionnage économique en France dans un entretien publié dans l’édition de samedi du Journal du Dimanche.

"Le nombre des incidents survenus sur le territoire français, que nous recensons depuis cinq ans, est alarmant. Il s’élève à plusieurs milliers", dit-il.

"Tous les secteurs, toutes les régions, et des entreprises de toutes tailles, sont touchés et le nombre de pays dont les ressortissants se livrent à de l’espionnage industriel est aussi en progression", ajoute-t-il.

Eric Besson a parlé d’un épisode de "guerre économique" au sujet de l’affaire Renault.

"Il y a une bataille mondiale pour l’innovation", a-t-il dit samedi sur Europe 1. "Je pense qu’elles (les entreprises) doivent mieux se protéger."