Peu avant la réunion des ministres des Finances européens, ce mardi, l’Irlande a répété qu’elle n’avait pas besoin d'une aide financière. Mais ces partenaires européens craignent un effet de contagion spéculatif similaire à la crise grecque.
"Il n'y a aucune raison pour laquelle nous devrions déclencher un plan de sauvetage du FMI ou de l'Union européenne". Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Dick Roche, a été catégorique, ce mardi, sur BBC Radio alors que les autres pays européens pressent l’Irlande d’accepter une aide financière internationale. La réunion des ministres européens des Finances risque de s’avérer décisive dans ce bras de fer.
L’Union européenne craint de plus en plus un scénario "à la grecque" avec une envolée de la spéculation sur l’euro. De son côté, le gouvernement irlandais réfute la comparaison répétant que "ce sont les banques qui ont besoin d’aide et non pas l’État". Pourtant, il existe bien des similitudes entre les deux crises.
"Le principal point commun entre les deux pays est la situation du déficit budgétaire qui dépasse les 10 %, aussi bien en Grèce qu’en Irlande", constate Christophe Blot, économiste à l’OFCE, le centre de recherche en économie de Sciences Po Paris. Dans les deux cas, le lourd endettement de l’État s’est traduit par une augmentation des taux d’intérêt sur la dette souveraine (les taux auxquels un pays doit rembourser lorsqu'il emprunte sur les marchés pour se financer). Des difficultés qui plaisent beaucoup aux spéculateurs. Lors de la crise grecque, ils avaient massivement misé sur une chute de l’euro et l’avait accélérée. Les pays européens craignent donc une répétition de ce scénario et une contagion à d’autres pays comme l’Espagne ou l’Italie.
Banques dépourvues
Pourtant, l’Irlande a raison de souligner les différences de situations. "Avant la crise, la Grèce était déjà fortement endettée, alors que l’Irlande était considérée comme le bon élève de la zone euro avec un fort excédent", rappelle Christophe Blot. Il y a bel et bien une spécificité irlandaise : leur économie a connu un effondrement du marché immobilier couplé à un fort surendettement des ménages pendant la crise. Les banques se sont alors trouvées fort dépourvues lorsque les particuliers et les entreprises n’ont plus pu rembourser leurs crédits. "L’endettement de l’État provient de tout l’argent que les autorités ont dû dépenser pour sauver le secteur bancaire", précise Christophe Blot.
Le particularisme de la situation irlandaise justifie-t-il pour autant son refus de se faire aider par l’Union européenne ? "L’Irlande traîne des pieds car si elle accepte l’aide, sa crédibilité économique en prendrait un coup", reconnaît Christophe Blot. Il rappelle que durant la crise financière, le secteur bancaire français avait tout d’abord refusé de se faire aider pour des raisons similaires. Finalement, les six principales banques avaient cédé. L’Irlande n’aura probablement pas le choix non plus car ses problèmes menacent toute la zone euro.
L’UE ne compte pas tergiverser
L’Union européenne a mis en place à la suite de la crise grecque des mécanismes comme le fond de stabilisation européen prévu spécifiquement pour ce genre de situation. Et cette fois-ci, l’UE ne compte pas tergiverser comme avec la Grèce et trimer ensuite pour rassurer les marchés financiers.
Reste qu’un plan d’aide "à la grecque" n’enchante pas l’Irlande. Les fonds débloqués à l’époque avaient certes permis de faire baisser les taux d’intérêt à court terme, mais ils sont repartis à la hausse et frôlent aujourd’hui les 12 %. L’Irlande devrait, en cas d’aide européenne, également se voir imposer des mesures pour réduire les dépenses publiques. Une mauvaise nouvelle pour sa croissance à court terme : le plan d’austérité grec va entraîner, selon les économistes, deux ans de récession avec son lot de chômeurs en plus.