
Suite au sommet économique qui s'est déroulé au Fort de Brégançon, l'Elysée a annoncé la suppression de 10 milliards d'euros sur les niches fiscales et sociales. Les prévisions de croissance ont été revues à la baisse pour 2011, de 2,5% à 2%.
AFP - Critiqué pour son excès d'optimisme, le gouvernement français a finalement revu à la baisse vendredi sa prévision de croissance pour 2011, ce qui complique encore un peu une équation budgétaire déjà délicate et l'oblige à renforcer son "coup de rabot" aux niches fiscales.
Jusqu'ici, Paris tablait sur une croissance de 1,4% cette année et de 2,5% par an ensuite pour ramener son déficit public à 3% du produit intérieur brut (PIB) en 2013, contre le niveau sans précédent de 8% attendu en 2010.
Mais la Commission européenne et le Fonds monétaire international (FMI) jugeaient les prévisions pour les prochaines années trop optimistes.
Malgré la relative bonne surprise du deuxième trimestre (0,6% de croissance), le gouvernement a fini par leur donner en partie raison: si "la perspective de croissance de 1,4% sera atteinte ou dépassée" cette année, elle est ramenée à 2% pour 2011, a annoncé l'Elysée après une réunion à Brégançon (Var) autour de Nicolas Sarkozy. Les prévisions pour les années suivantes ne sont pas remises en cause.
"Pour 2011, une prévision de croissance de 2% n'est pas éloignée du consensus des économistes", explique à l'AFP Laurence Boone, de Barclays Capital, qui mise sur une hausse de 1,8% du PIB.
Certains experts restent toutefois sceptiques.
"Comment faire beaucoup mieux que cette année l'an prochain, alors que les mesures de soutien à l'activité auront disparu, que la demande externe sera moins vigoureuse car la Chine tente de refroidir son économie, et que l'Allemagne ne connaîtra pas une croissance aussi flamboyante qu'en 2010?", s'interroge ainsi Elie Cohen, chercheur au CNRS.
Pour Eric Heyer, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), cette prévision "reste très ambitieuse, et en tout cas difficile à atteindre avec une politique aussi rigoureuse que celle qui a été annoncée".
Car l'Elysée a été clair: "La réduction du déficit public à 6% du PIB en 2011, quel que soit le niveau de la croissance, constitue un objectif majeur".
Pour le ministre du Budget François Baroin, il faudra donc "trouver entre trois et trois milliards et demi d'euros supplémentaires, ce qui est parfaitement atteignable".
Du coup, l'effort de réduction des exonérations d'impôts et de cotisations se situera tout en haut de la fourchette de 8,5 à 10 milliards d'euros évoquée avant les vacances. "Dix milliards d'euros de niches fiscales et sociales seront supprimés à l'automne", a tranché la présidence.
Les niches fiscales et sociales représentent un manque à gagner annuel de 115 milliards pour les finances publiques.
"Ces réductions seront inscrites dans le budget pour 2011, mais cela ne signifie pas qu'il y aura dix milliards de recettes supplémentaires dès l'an prochain", précise-t-on à Bercy. "Cela dépendra des dispositifs visés", ajoute-t-on, car tout changement concernant les niches sur les impôts sur le revenu ou sur les sociétés ne se traduira en termes de recettes qu'en 2012.
Or, pour l'instant, le gouvernement reste muet sur le détail. Les arbitrages "ne seront définitifs que vers mi-septembre", se borne-t-on à dire au ministère de l'Economie.
Quoi qu'il en soit, Bercy martèle que l'effort annoncé suffira à compenser la croissance moins forte pour réduire le déficit.
"Tout dépendra de quelles dépenses et quelles niches seront visées", nuance Laurence Boone.
Jusqu'ici, le gouvernement a listé les niches qu'il entend épargner, confirmées vendredi à l'AFP par Bercy: crédit d'impôt recherche, emploi d'un salarié à domicile, TVA réduite dans la restauration et pour la rénovation de logements... C'est-à-dire les plus coûteuses pour l'Etat.
"Le gouvernement s'est lié les mains tout seul", constate Eric Heyer.