
Après l'annonce de la libération imminente de 52 détenus politiques cubains obtenue sous l'égide de l'Église catholique, Guillermo Farinas a mis fin, jeudi, à sa grève de la faim entamée le 24 février dernier.
AFP - L'opposant cubain Guillermo Farinas a mis un terme jeudi à 135 jours de grève de la faim après l'annonce des libérations prochaines de 52 détenus politiques sous la médiation de l'Eglise catholique qui sort renforcée de cette première crise sous la présidence de Raul Castro.
"Guillermo Farinas met un terme à sa grève de la faim et de la soif à partir de maintenant", a déclaré à l'AFP l'opposante Gisela Delgado après avoir rendu visite au cyberjournaliste de 48 ans, traité depuis mars au service des soins intensifs de l'hôpital de Santa Clara (270 km à l'est de La Havane).
itL'opposant et ex-prisonnier politique Hector Palacios a lu une déclaration dictée et signée par M. Farinas dans laquelle il laisse entendre qu'il pourrait reprendre sa grève si les 52 prisonniers n'étaient pas tous libérés dans le délai de quatre mois promis à l'Eglise, médiatrice dans ce dossier.
Cinq d'entre eux doivent être libérés dans les "prochains jours" et partir avec leur famille pour l'Espagne, a précisé dans un communiqué l'Eglise catholique en dévoilant l'identité des "Cinq" âgés entre 33 et 60 ans et qui purgeaient des peines allant de 13 à 24 ans de prison.
"Cette confrontation entre démocrates et antidémocrates n'a fait ni vainqueurs ni vaincus. C'est Cuba qui a gagné", a dit M. Farinas selon le texte lu à l'hôpital où s'étaient réunis une trentaine de dissidents.
Guillermo Farinas avait entamé son 23e jeûne de protestation le 24 février, au lendemain de la mort controversée d'un détenu d'opinion en grève de la faim, une affaire qui avait causé de vives tensions à Cuba. Farinas réclamait la libération de 26 prisonniers politiques malades.
L'Eglise avait déjà obtenu le mois dernier la libération du plus malade des prisonniers de conscience, Ariel Sigler. Elle a fait son annonce mercredi après une rencontre entre le président Raul Castro, le cardinal Jaime Ortega et le chef de la diplomatie espagnole Miguel Angel Moratinos.
Fait rarissime, la presse cubaine, sous contrôle de l'Etat, a publié jeudi le communiqué intégral de l'Eglise sur la libération prochaine de "52 prisonniers", sans mentionner toutefois qu'il s'agissait de détenus politiques.
"L'Eglise a joué un rôle crucial pour dénouer cette crise. Elle a certes permis au gouvernement de se tirer d'une mauvaise passe, mais il y un dialogue d'entamé, une ouverture possible pour des changements" dans ce pays traversant une crise socio-économique, a estimé l'ancien détenu politique Oscar Espinosa.
Il s'agit du plus important processus de libérations depuis que Raul Castro a succédé à son frère Fidel il y a quatre ans. Ce dernier avait libéré en 1998 une centaine de détenus politiques peu après la visite historique du pape Jean Paul II sur l'île communiste.
La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, qui s'est entretenue au téléphone avec M. Moratinos, a salué cette annonce "tardive, mais bienvenue".
Les Etats-Unis exigent des réformes démocratiques à Cuba, île dirigée par un parti unique, pour envisager de lever leur embargo économique et financier, en vigueur depuis 48 ans.
Les opposants cubains sont considérés par La Havane comme des "mercenaires" à la solde des Etats-Unis. Cuba détient depuis début décembre un sous-traitant américain accusé de fournir du matériel de communications à l'opposition.
L'Union européenne a elle aussi salué la décision de La Havane et exprimé l'espoir que tous les prisonniers politiques cubains soient libérés, qui resteront une centaine à l'issue du processus annoncé.
L'organisation Amnesty International a déploré le délai imposé pour la libération de ceux qu'elle considère tous comme des prisonniers de conscience.