Une conférence multinationale sur l’Afghanistan débute ce jeudi et soulève espoirs et interrogations. Que peut-on en attendre ?
Près de 70 pays ont envoyé des représentants à Londres pour cette grande conférence sur l’Afghanistan. Dans le cadre somptueux de Lancaster House, un bâtiment qui dépend du ministère des Affaires étrangères britannique, tout ce beau monde va débattre des méthodes pour ramener le calme en Afghanistan.
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, le secrétaire général de l’Otan Anders Fogh Rasmussen et la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton font partie des plus célèbres invités attendus, aux côtés du président afghan Hamid Karzaï.
Pour démêler la langue de bois des vraies annonces, voici un petit guide des sujets chauds de la conférence :
1- Parler aux Taliban
Si l’idée de parler aux Taliban n’est pas neuve, elle devrait prendre forme à Londres. Il sera question de la réintégration des Taliban qui ont renoncé à la violence, de leur lien avec Al-Qaeda et de leur acceptation de la Constitution afghane. Preuve que le sujet est dans l’air du temps, les Nations unies ont retiré de leur liste de personnes susceptibles d’encourir des sanctions cinq hauts responsables des Taliban afghans, deux jours avant le début de la conférence. Le président Hamid Karzai s’est aussi publiquement exprimé sur le sujet.
La création d’un fonds d’aide à la réintégration devrait être annoncée lors de la conférence. Il serait doté de 500 millions de dollars sur 5 ans et les principaux donateurs devraient être les États-Unis, la Grande-Bretagne et Japon. Ces deux derniers pays sont également pressentis pour présider ce fonds. L’Allemagne a déjà fait savoir qu’elle apporterait 50 millions d’euros.
it2- Nouvelles nominations, nouveaux postes
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, doit annoncer pendant la conférence la nomination d’un nouvel envoyé spécial pour l’Afghanistan. Le Norvégien Kai Eide, qui occupe actuellement le poste, est censé quitter le pays en mars. Parmi les candidats, le diplomate suédois Stephen de Mistura semble être le favori selon la presse.
En parallèle du commandement militaire de l’OTAN, un poste de commandement civil a été crée. Mark Sedwill, l’ambassadeur britannique en Afghanistan, va en prendre les rênes et deviendra, ainsi, le pendant civil du général américain Stanley McChrystal. Son rôle sera de développer et coordonner l’aide à la population afghane.
3- De nouvelles troupes
Quels États membres de l’Otan vont déployer de nouvelles troupes en Afghanistan ? Et combien de soldats viendront s’ajouter aux 30 000 militaires américains supplémentaires promis en décembre par le président Obama ?
La Grande-Bretagne s’est déjà engagée à en fournir 7 000 en plus. La chancelière allemande Angela Merkel a surpris tout le monde en promettant, mardi, 500 soldats supplémentaires. Rien en revanche côté français, si ce n’est l’envoi de personnel non-combattant évoqué par le président Nicolas Sarkozy. Le Canada et les Pays-Bas, autres pays engagés sur le terrain, ne devraient pas faire d’annonce à ce sujet.
4 – De l’argent, mais pour quoi faire ?
Ce n’est pas tant le montant que la manière qui importe en Afghanistan. Selon les estimations du gouvernement afghan, 1,7 milliard de dollars ont déjà été dépensés par les ONG pour l’aide dans le pays, et le gouvernement américain devrait verser plus d’1 milliard de dollars supplémentaires en 2010. Andrew Jackson, un analyste politique du Conseil international pour la sécurité et le développement (ICOS), un groupe de réflexion basé à Londres, juge qu’il y a suffisamment d’argent pour l’Afghanistan. Pour lui, la question est de savoir comment cette argent va être dépensé. Huit ONG ont dénoncé mercredi le risque de "militarisation de l’aide internationale".
5 – Rencontres au sommet
Les rencontres entre frères ennemis devraient assurer le spectacle dans les coulisses et être suivi de près. L’Iran, le voisin encombrant de l’Afghanistan, a été invité à la conférence. Mais la présence de son représentant à Londres n’a pas été confirmée et les spéculations vont bon train. D'autant plus que mardi, un porte-parole du ministre des Affaires étrangères, a indiqué que Téhéran se posait la question de son éventuelle présence.
L’Inde et le Pakistan, frères ennemis par excellence, ont tout deux envoyé un représentant. La presse indienne suggère qu’il n’y aura pas de rencontre bilatérale entre ces deux pays qui se suspectent d’agir en sous-main en Afghanistan.
6 – Le mot à suivre : "Afghanisation"
Lors de sa nomination au poste de commandement civil de l’Otan en Afghanistan, Mark Sedwill a été le premier à parler d’"Afghanisation". Un concept repris ensuite par plusieurs chefs d’État, y compris Nicolas Sarkozy. Mais de quoi s’agit-il ? Le terme désignerait l’objectif affiché de transférer, à terme, les pleins pouvoirs aux autorités afghanes. Selon certains, le mot cache un but beaucoup moins noble, à savoir se retirer militairement au plus vite du pays alors même que l’État n’est pas encore en mesure d’assumer toutes ses responsabilités.
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