Le caractère raciste a été retenu par les enquêteurs de la police judiciaire, samedi, dans le cadre des investigations pour déterminer les raisons qui ont poussé un homme de 69 ans, déjà poursuivi pour une agression raciste, à ouvrir le feu vendredi en plein centre de Paris, tuant trois Kurdes et faisant trois blessés.
Au lendemain d’une attaque faisant trois morts et trois blessés, dont un en urgence absolue, devant un centre culturel kurde situé dans le 10ème arrondissement de Paris, le mobile raciste a été retenu par l'enquête, samedi 24 décembre, a annoncé le parquet, qui a prolongé la garde à vue du suspect.
Les investigations portent désormais sur des faits d'assassinats, tentatives d'assassinat, violences avec arme et infractions à la législation sur les armes à caractère raciste. "L'ajout de cette circonstance ne modifie pas la peine maximale encourue, qui demeure la réclusion criminelle à perpétuité", a précisé le parquet.
Agé de 69 ans et de nationalité française, ce conducteur de train à la retraite a déjà été condamné à deux reprises pour détention prohibée d'armes et pour violence avec armes, et mis en examen dans une autre affaire d'agression. Aux policiers qui l'ont interpellé, il a déclaré avoir agi parce qu'il était "raciste", selon une source proche du dossier.
Ses trois victimes, une femme et deux hommes, abattues avec une arme de poing, sont d'origine kurde, ont indiqué les autorités et un responsable communautaire kurde.
L'homme a été interpellé par la police après avoir été maîtrisé par plusieurs personnes dans un salon de coiffure à proximité, puis placé en garde à vue.
Près de lui a été découverte "une mallette" contenant "deux ou trois chargeurs approvisionnés, une boîte de cartouches calibre 45 avec au moins 25 cartouches à l'intérieur", selon une source proche du dossier. L'arme utilisée est un "Colt 45 de 1911" de l'armée américaine "d'apparence usée".
La piste d'un attentat terroriste écartée
En 2017, l'homme avait été condamné à six mois de prison avec sursis pour détention prohibée d'armes.
Il est en revanche inconnu des fichiers du renseignement territorial et de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et "n'était pas fiché comme étant quelqu'un de l'ultradroite", selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.
La piste d'un attentat terroriste a, elle, été écartée, selon la procureure.
Le matin des faits, "il n'a rien dit en partant (...) Il est cinglé. Il est fou", a déclaré à l'AFP le père du suspect âgé de 90 ans, le décrivant comme "taiseux" et "renfermé".
Il a "voulu s'en prendre à des étrangers" et a "manifestement agi seul", a estimé Gérald Darmanin, précisant qu'il fréquentait un stand de tir.
"Il n'est pas sûr que le tueur qui a voulu assassiner ces personnes (...) l'ait fait spécifiquement pour les Kurdes", a-t-il souligné, alors que des rumeurs d'attaque "politique" étaient relayées par la communauté kurde.
Les "motifs racistes des faits" vont "évidemment faire partie des investigations, a renchéri Laure Beccuau lors d'un point presse.
"Rien ne permet à ce stade d'accréditer une quelconque affiliation de cet homme à un mouvement idéologique extrémiste", a-t-elle précisé en fin de journée dans son communiqué.
L'émotion a gagné la communauté kurde très présente dans ce quartier, qui a évoqué un acte "terroriste" et mis en cause la Turquie. De violents incidents ont éclaté avec les forces de l'ordre, et une personne a été interpellée, a indiqué à l'AFP une source policière.
Le préfet de police Laurent Nuñez doit recevoir samedi matin des responsables de la communauté kurde, qui ont par ailleurs annoncé une manifestation à la mi-journée à Paris.
Avec AFP et Reuters