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Facebook, Twitter, YouTube ou encore TikTok ont multiplié les garde-fous pour éviter que leurs plateformes ne deviennent des vecteurs de désinformation et d’incitation à la violence, lors de l'élection aux États-Unis, et même après. Très critiquées par le passé, ces plateformes ne peuvent pas se permettre un nouveau raté. 

Ils vont avoir du travail et ils le savent. Facebook, Twitter, YouTube, Google et, dans une moindre mesure, Snapchat, Reddit ou encore TikTok se sont préparés à un période électorale et post-électorale aux États-Unis des plus mouvementées et potentiellement risquée pour leur réputation au niveau mondial.

Ces réseaux sociaux ont multiplié, ces derniers mois, les efforts pour contrer la propagation de rumeurs durant la campagne électorale. Sans grand succès, ont constaté différentes études, qui ont toutes souligné une hausse de la désinformation sur ces plateformes durant cette période.

Des dangers multiples

Pourront-elles faire mieux alors que les Américains s’apprêtent à trancher entre le démocrate Joe Biden et le président sortant républicain Donald Trump ? Le tout, sur fond d’une pandémie de Covid-19.

Les dangers sont multiples : contestation des résultats, incitation à la violence post-électorale, désinformation au sujet du processus de décompte des voix... Dans un pays comme les États-Unis, où "les réseaux sociaux sont la source principale d’information pour une majorité de citoyens, la responsabilité de ces géants de la Tech est grande", résume CNN.   

Pour faire face à ces défis, ces plateformes sont passées à la vitesse supérieure depuis septembre. Le site de l’Election integrity partnership, une coalition d’ONG et de centres universitaires américains de recherche, qui surveille le bon déroulé du scrutin, a ainsi dû mettre à jour six fois en deux mois sa page dédiée aux initiatives prises par les réseaux sociaux pour contrer ces menaces à l’intégrité du processus électoral.

"Le plus grand risque à nos yeux vient de la possible remise en cause du processus de décompte des voix par le président et son parti", a expliqué à CNN un employé d’un de ces réseaux sociaux, qui a préféré garder l’anonymat. Les attaques constantes de Donald Trump contre le vote par correspondance — perçu comme favorisant le camp démocrate — font craindre que des partisans du président proclament le score avant la fin du dépouillement de tous les bulletins.

C’est pourquoi Facebook et Twitter ont prévu, dès mardi soir, d’interdire à leurs utilisateurs de crier victoire avant que les résultats soient vérifiés et validés par plusieurs médias de confiance, telles que les agences de presse Reuters ou Associated Press. Twitter a aussi prévu d’ajouter un avertissement spécifique sur les messages qui feraient circuler des faux résultats pour signifier que le décompte des voix n’est pas encore achevé. 

Plus ou moins strictes

Les deux principaux réseaux sociaux espèrent que répéter ad nauseam que le dépouillement prend du temps, leur évitera d’avoir à censurer purement et simplement les messages de responsables politiques qui feraient circuler, volontairement ou involontairement, des informations erronées. Ils n’ont aucune envie d’être de nouveau accusés d’avoir pris le parti de l’un ou l’autre candidat à cause de leur politique de modération.

Ils seront, en revanche, beaucoup plus stricts avec les publicités politiques. Déjà interdites depuis deux semaines, elles continueront à l’être après le vote pour une durée d’au moins sept jours. C’est aussi le choix qu’a fait Google — à la fois sur son moteur de recherche et sur YouTube — afin d’éviter "que des publicités renforcent la confusion post-électorale", note la BBC britannique.

TikTok, le réseau social d’origine chinoise honni par Donald Trump et adoré des adolescents, a mis en place un partenariat avec plusieurs sites de vérifications des informations pour essayer d’être le plus réactif possible dans sa politique de modération. Il a aussi introduit une option permettant à ses utilisateurs de signaler des fausses informations sur les résultats qui circuleraient.

De son côté, Reddit "fera bien plus que les autres grands réseaux sociaux", estime la BBC. Le gigantesque site communautaire où des dizaines de millions d’internautes se retrouvent pour discuter de tout et de rien a décidé de supprimer le moindre message qui remettrait en cause l’intégrité du scrutin. Plusieurs spécialistes - des politologues, juristes, journalistes - répondront, au lendemain du vote, à toutes les questions des internautes sur cette élection. Le site, longtemps considéré comme l’un des berceaux de nombre de théories du complot, espère que ce mélange entre sévérité et éducation lui permettra de redorer son blason.

Contre les interférences étrangères

Ces grandes plateformes ne veulent pas non plus revivre la même expérience qu’en 2016 lorsqu’elles avaient été accusées d’avoir laissé des puissances étrangères faire circuler des fausses informations sur l’élection. Surtout que, cette fois-ci, les agences américaines de renseignement ont prévenu que la Russie n’était plus le seul pays à vouloir perturber le processus électoral américain. Il faut aussi compter sur les Iraniens et les Chinois, a souligné William Evanina, le chef des services de contre-espionnage.

Des pirates informatiques iraniens ont, ainsi, été pris la main dans le sac, fin octobre, alors qu’ils envoyaient des messages de menace à des électeurs démocrates en se faisant passer pour des membres des Proud Boys, un groupe d’extrême droite américain qui soutient Donald Trump.

À l’aide d’algorithmes maisons, Facebook et Twitter ont musclé leurs équipes censées repérer toute activité suspecte susceptible d’être une opération menée par des agents de puissances étrangères. Facebook est aussi prêt à mettre en œuvre les mêmes outils, qu’il a utilisés pour limiter la circulation de messages incitant à la violence après des élections contestées dans des pays comme la Birmanie, note le New York Times.

Reste à voir si tous ces efforts porteront leurs fruits. En 2016, Facebook & Cie ont pu dire qu’ils avaient été pris de court. Ce qui ne les a pas empêchés d’être très critiqués. Cette fois-ci, ils n’auront plus cette excuse.